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Depuis plus de deux semaines, les antennes du groupe Radio France sont perturbées par un mouvement de grève (France Inter, le réseau France Bleu, France Info, France Culture, Mouv’ et FIP).

Tout avait commencé par le ClarkGate, à savoir le refus de la sacro-sainte Commission de la carte d’en délivrer une à Pascale Clark parce que son émission A Live serait du divertissement et non du journalisme. Ni une ni deux : le matin suivant le scandale, Patrick Cohen déchira héroïquement son propre sésame pour soutenir sa consœur. Le justicier matinal, le Zorro de l’aube, le Robin des bois de l’aurore avait frappé, non sans grandiloquence, l’esprit de ses fidèles auditeurs.

Patrick a-t-il déchiré sa feuille d’imposition en soutien aux petits retraités obligés de payer leurs premiers impôts il y a deux ans ?

Ce geste a certainement fait frémir de plaisir dans les couloirs de la station, tant le sémillant Patrick et sa gouaille révolutionnaire ont fait le tour des réseaux sociaux en ce jour inoubliable. Mais c’était sans compter sur l’absence de solidarité des internautes qui ont soit moqué ce geste aventureux, soit ignoré cette tendre révolte contre un morceau de papier, parce que cet acte d’humeur consacre l’entre-soi d’une élite médiatique solidaire seulement de ses collègues des hautes sphères.

Patrick a-t-il déchiré sa feuille d’imposition en soutien aux petits retraités obligés de payer leurs premiers impôts il y a deux ans ? A-t-il brûlé son contrat par solidarité envers les milliers de chômeurs qui grossissent chaque jour un peu plus les rangs de Pôle emploi ? Non, et après tout ce n’est pas ce que l’on demande à un journaliste, même si ce dernier aime se grimer en procureur.

Le grand maquis de Radio France

Depuis plus de quinze jours, la grève se reconduit donc quotidiennement sur les radios d’un service pourtant financé par l’Etat donc le contribuable. En cause ? Un homme, Mathieu Gallet, ancien patron de l’INA propulsé à la tête du groupe l’an dernier, devenu la tête de turc des employés pour son plan d’économies (pourtant légitimé par le récent rapport de la Cour des comptes) ainsi que pour le montant de la rénovation de son bureau ou bien le coût de ses frais de communication.

Ces mignons Charlie qui ont certainement participé à la grande transhumance des Gentils au mois de janvier ont visiblement tout oublié, déjà, de leurs principes hivernaux : la chasse est ouverte et la meute s’acharne sur un homme et tant pis si les frais de rénovation ont été signés avant son arrivée et si la gabegie est connue de tous dans la maison ronde.

Et tant pis si cette mutinerie adolescente coûte cher : après tout ce n’est que la redevance des braves Français.

Ce « mouvement social » est un paradoxe. Les auditeurs ne le comprennent pas mais en subissent les conséquences. Il n’intéresse seulement que les autres journalistes toujours prompts à donner la parole à leurs collègues, renforçant chaque jour un peu plus l’esprit de caste et le corporatisme dans les crânes. Et tant pis si cette mutinerie adolescente coûte cher : après tout ce n’est que la redevance des braves Français.

Parce qu’un véritable mouvement de grève, légitime et bien compris, ne concerne pas ces hipsters apprentis maquisards mais plutôt les ouvriers qui se battent tous les jours face aux délocalisations et aux plans sociaux dans l’indifférence générale. C’est le Front populaire version bobos, pour le maintien de certains privilèges. On aimerait entendre davantage ces Louise Michel et ces Che Guevara du XVI ème arrondissements lorsque Mory Ducros (maintenant Mory Global) ferme ses grilles. C’est l’illusion juvénile de la lutte, alors que les problèmes des Français sont beaucoup plus graves que des travaux jugés trop onéreux par la CGT.

En tout cas, si Thomas Legrand cherche un énième motif du rejet des élites dans l’opinion ainsi que de la montée du FN, il lui suffit d’écouter geindre ses confrères sur les plateaux de télévision.

 

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Julien Leclercq

Fondateur du Nouveau Cénacle et auteur de "Catholique débutant" paru aux éditions Tallandier.

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