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La désormais ancienne Garde des Sceaux a donc quitté ses fonctions le mardi 26 janvier, marquant les esprits en quittant son ministère. 

La gauche déraille, mais pas Christiane Taubira. Du moins pas sur son vélo. Symbole de l’Albatros baudelairien qui reprend enfin son envol dans les rues de Paris, l’ex ministre de la Justice a trouvé un excellent moyen de rendre cette passation de pouvoir – exercice ronflant et soporifique s’il en est – inoubliable. Cette voyageuse ailée, comme elle est de gauche et belle !

Et tant pis si chacun sait qu’elle est escortée et qu’une voiture avec chauffeur l’attend certainement cent mètres plus loin. Il s’agit simplement de nourrir l’ogre médiatique en continu qui fait le pied de grue place Vendôme en meublant comme il peut : Christiane Taubira quitte le ministère à vélo : cela devient une information, un fait que les éditorialistes décryptent en direct. Le Monde déclare même : « Quitter un gouvernement avec qui elle avait un désaccord majeur avec un moyen de transport qu’on a voulu lui interdire est une image symbolique voulue ». Les limites du ridicule semblent donc infranchissables, tant les journaux-de-référence n’ont de cesse de les repousser jour après jour.

Ce sourire enfantin en fendant la foule ébahie avait même quelque chose de touchant. Jeanne d’Arc fait du VTT !

En tenant son guidon, elle arborait d’ailleurs le même sourire grotesque de celui que nous connaissons tous : le détenteur d’une carte Vélib’. Ce précautionneux qui marche toujours avec son casque sous le bras, et dégaine fièrement son sésame en déclarant niaisement : « Ah non, pas de taxi, je rentre en vélo ». Celui qui prend la capitale pour un terrain de jeux, qui pousse l’excentricité jusqu’à faire du rollers place du Trocadéro le dimanche.

Nous retrouvons cette même tendre rébellion par la bicyclette avec Christiane, pour ne pas dire cette même forme de régression.  Ce sourire enfantin en fendant la foule ébahie avait même quelque chose de touchant. Jeanne d’Arc fait du VTT ! Même l’ascension du Mont Ventoux n’a jamais autant ému les commentateurs.

La ministre du prêt-à-mâcher journalistique

Cela aurait pu être drôle, si ce n’était pas aussi triste. Jusqu’au bout, Christiane Taubira aura été cette ministre du prêt-à-penser médiatique. Donnant aux médias ce qu’ils veulent entendre, leur faisant dire ce qu’ils veulent dire. Son départ spectaculaire du ministère était en lui-même une fiche pré-remplie pour les toutologues en plateau : Regardez, elle est à vélo, elle marque sa différence et sa liberté. Et en plus, c’est écologique.

C’est un écho à tout ce qui a pu être proféré, commenté, écrit la concernant. Elle est attaquée ? C’est parce que la droite est raciste. Des critiques contre le mariage pour tous ? Parce que la Manif pour tous serait homophobe. Et la liste est longue, parce que Christiane Taubira a toujours été finalement plus intelligente que ses détracteurs, les faisant tomber dans tous les panneaux ; comme elle a toujours su jouer avec les caméras. Si bien que chaque journaliste affirme avec aplomb depuis mai 2012 que c’est « un marqueur de gauche », oubliant sans doute son soutien à Edouard Balladur dans les années 90.

Regardez, elle est à vélo, elle marque sa différence et sa liberté. Et en plus, c’est écologique.

Que tous les vendeurs de Décathlon se réjouissent : ils sont des icônes de gauche en puissance. Des apôtres de la liberté en péril. Des résistants à dix vitesses. Des Jean Moulin tout terrain. Si, ainsi juchée sur une selle à faire coucou aux cameramen, la dignité de la fonction ministérielle interroge, il faut admettre que l’opération de communication est parfaite. BFM TV est repue. ITélé est rassasiée. Tremble, Jean-Jacques Urvoas ! Le glouton médiatique n’en a pas fini avec sa boulimie.

Julien de Rubempré

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Julien Leclercq

Fondateur du Nouveau Cénacle et auteur de "Catholique débutant" paru aux éditions Tallandier.

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