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A l’heure où le conflit israélo-palestinien s’embrase dans et hors sol, les prises de position fleurissent partout en France, dans les médias et sur les réseaux sociaux. De fait nous sommes priés de partager la cause palestinienne, israélienne, ou dans une volonté humaniste, de promouvoir la Paix. Le scepticisme qui consiste à ne pas trouver de vérité avec certitude n’est point de mise.

Après les débats houleux du mariage pour tous lors de référendums populaires clivant partisans et opposants, l’on pensait le combat manichéen en congé pour l’été. La France était apaisée et prête à bronzer. La question de l’euthanasie était elle-même laissée en suspens afin de souffler avant la rentrée. Mais le récent conflit israélo-palestinien a réveillé les ardeurs de nos chers compatriotes, reprenant les armes de la rhétorique afin de prendre la défense de l’un ou de l’autre. Dès lors les joutes verbales où se mêlent faits, démonstrations, photos, vidéos mais aussi rumeurs, mensonges, propagande et supercherie de part et d’autre vont fleurir dans les médias pour mieux nous éclairer. Et prendre parti. Aux lecteurs de séparer le bon grain de l’ivraie. Chose faite, l’objectivité et l’honnêteté totale dont nous devons faire preuve ne nous permettent pas d’avoir un avis tranché. La profusion d’informations et l’opposition constante thèse/antithèse chère à Hegel ne sont en aucun cas une réponse donnée, tant ils paraissent tous (il)légitimes.

Il est alors  nécessaire d’avouer son empêchement à toute forme d’appartenance, d’assumer son scepticisme, de confesser être dans une impasse. Juger que nous sommes incapables de juger. Comment en effet dénouer ce nœud gordien qui prend ses racines dans la religion, auquel s’est superposé le politique et l’économique ? Comment dépecer ce flot continu d’événements que les différents camps ne cessent de marteler, expliquant un fait par un autre :

– Lorsque certains médias évoquent les multiples bombardements sur les civils palestiniens ; d’autres soulignent l’emploi de boucliers humains.

– Quand les uns parlent de tir de roquettes israéliens ; les autres répondent par des attentats à la bombe dans les rues de Jérusalem.

– Alors que les pro-palestiniens dénoncent l’impérialisme juif et l’expropriation des terres arabes ; les partisans d’Israël dénoncent le Djihad et la guerre sainte.

– Au procès fait aux associations juives telles que la LDJ, le CRIF ou encore le Betar ; d’autres pointent du doigt l’islamisation des jeunes dans les banlieues.

– Quand on dénombre le nombre de morts palestiniens ; d’autres dénombrent le nombre de morts israéliens.

– Pendant que des milliers de musulmans sont tués ; l’on dénonce le massacre des Chrétiens d’Orient.

– A un prétendu antisémitisme sous-jacent ; s’oppose une soi-disant islamophobie gangreneuse.

– Lorsqu’une grande partie de la classe politique manifeste pour l’une ou l’autre de ces causes.

Israël / Palestine : le doute face à l’Histoire

Les partis politiques n’échappent pas à la dichotomie Gauche/Droite.  Les militants d’extrême-gauche et une partie des socialistes défilent ainsi aux cotés des manifestants pro-palestiniens quand la droite, plus enclin à adouber l’alliance israélo-américaine, reste muette. C’est bien cette même contradiction révélatrice d’une position sur l’échiquier politique qui nous incite consciemment ou non à s’exprimer sur le sujet. Dès lors la subjectivité et la partialité l’emportent sur une réflexion non-encartée qui renverrait alors les deux camps dos à dos.

Devant cette liste non exhaustive d’arguments contradictoires, il est aisé, en accord avec sa sensibilité politique, de mettre l’accent sur un événement ou un autre. Il est plus sensible d’admettre que nous puissions être en proie au doute et de mettre en lumière les antagonismes de ces deux démonstrations.

Ne pas s’engager revient alors à exprimer ce droit au scepticisme et reconnaître que l’Histoire, par moments, nous dépasse.

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Andrés Rib

Ancien de la Sorbonne. Professeur de Lettres. Aime le Balto, et la Philo.

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