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Je viens de démissionner de ma formation d’arbitre. La ligue m’a bien fait comprendre qu’il valait mieux commencer par des matchs de district à Creil. Non pas que je craigne ces banlieues… Loin de moi cette idée ! C’est que le transport est à ta charge tant que tu n’es pas encore professionnel. Du coup, j’ai écrit à Manuel Valls pour changer de filière et devenir CRS.

Quelle magnifique vocation que de porter l’uniforme. Devenir CRS en 2013, un acte révolutionnaire ! Je veux porter le casque sur la tête, la visière aux yeux, le bâton et le bouclier dans les mains, le gaz en poche, derrière les barricades, à attendre le moment pour l’intervention. Nous avançons dans les fumigènes en chantant fièrement la Marseillaise : « Entendez-vous dans nos campagnes mugir ces féroces soldats ».

Oui, je veux devenir le corps protecteur de la République. Aucune manifestation ne s’organisera sans ma présence et je guetterai tout fauteur de trouble. Car toucher à la célébration du titre de champion de France du PSG attendu depuis 19 ans m’est encore insupportable. 

Je me suis bien rendu place du Trocadéro ce lundi avec mon drapeau et mon maillot. Les pétards éclataient, comme au 14 juillet. Les jeunes et les vieux étaient là, les filles avaient revêtu le maillot de Beckham, chaque arbre était squatté par deux ou trois supporters… Ça chantait, ça ambiançait pas mal. Je me suis positionné dans la foule. « Ah ! Le car des joueurs arrive. Ça y est, je vais les voir, les applaudir, chanter ICI C’EST PARIS ! » Un, deux, trois fumigènes se sont allumés devant moi et projetaient dans la foule une épaisse fumée grise. C’était lumineux mais ça ne servait pas à grand-chose. Le car est passé et je n’ai rien vu. La fumée s’est dissipée. Est venue l’attente. Le podium trop loin, l’écran géant difficile à voir… C’est alors que ces énergumènes sont montés les uns après les autres sur les échafaudages du palais de Chaillot.

A l’insécurité ambiante, s’ajoutait celui qui grimpa jusqu’en haut se croyant plus malin qu’un singe. Ce n’était plus drôle. J’ai préféré rebrousser chemin, en constatant que les grilles du métro étaient fermées. Chez moi, j’ai pu revoir les images du sacre et profiter de BeInSport pour raccompagner les joueurs dans leur bus jusqu’au Parc des Princes. Il y a eu la rétro de l’année puis l’annonce : la croisière annulée, les casseurs avaient gâché une fête tant attendue. Alors voilà, lorsque je deviendrai CRS, je me vengerai. Oui toi le féroce casseur qui vient d’égorger ma passion, si tu oses, viens dans mes bras tâter la matraque. Et si tu ne viens pas, je courrai derrière toi. Et tant que le sang n’aura pas giclé de tes veines, de ton aorte ou de ton liquide céphalorachidien, je continuerai à te poursuivre. A chaque évènement  jusqu’à Villepinte, je serai vaillant. Je le karcheriserai, je valserai avec lui, jusqu’à le défaire de ses oripeaux et le réduire au néant.

Je serai le Django des CRS, le Vidocq du lacrymogène, le Billy the Kid de la matraque, le Zorro du bouclier.  Alors finalement je me retrouverai peut-être parfois à Creil ou à Villiers-le-Bel mais aux frais de la République cette fois et non plus pour souffler dans le sifflet mais dans les bronches de ces jeunes sans jugeote, qui préfèrent s’affirmer dans la violence que dans la réussite, qui pensent devenir des hommes en s’opposant au système établi. La révolution ce n’est pas une minorité qui s’oppose à la majorité. C’est bien la majorité qui s’offusque des comportements d’une minorité. Ce n’est pas pour autant que Le Pen aura raison, mais ne lui donnons pas pour autant les moyens de l’avoir. Si le casseur a ses raisons que la raison ne connaît pas, la raison du plus fort demeure toujours la meilleure. Alors avant qu’il ne soit trop tard, avant que les fascistes aient le pouvoir, soyez derrière moi, camarades ! Portons l’uniforme et la matraque, cassons du casseur, gazons ces fumeurs d’herbe, montrons le chemin de l’ordre et de la raison et profitons sereinement de nos célébrations et de nos manifestations.  

Fabrice Piofret

Fabrice Piofret

Il paraît que ma photo traîne dans la chambre de Julien de Rubempré... 34 ans.

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