Après un ouvrage particulièrement réussi sur Les Derniers feux de la monarchie, Charles-Eloi Vial publie une biographie de Marie-Louise aux éditions Perrin. Un livre tout aussi brillant, qui réhabilite une figure méconnue de l’Empire.
Nièce de Marie-Antoinette, Marie-Louise de Habsbourg a été victime des mêmes calomnies que sa tante. Croqueuse de diamants, comploteuse voire nymphomane : rien n’aura été épargné à celle qui succéda à Joséphine auprès de Napoléon Ier. Pourtant, rien ne prédestinait la jeune et insouciante archiduchesse à devenir la femme de l’Empereur. En 1809, une guerre éclate entre la France et l’Autriche, et les troupes napoléoniennes font le siège de la capitale autrichienne, attisant la rancoeur de la population comme celle de Marie-Louise. Dans une lettre, elle confie : « Nous avons appris avec joie que Napoléon était présent à la grande bataille qu’il a perdue. Puisse-t-il aussi perdre la tête ».
« Sur la scène européenne, le mariage de Napoléon avec la fille des Césars fut autant un coup d’éclat qu’un coup de génie diplomatique ».
En France, Joséphine ne pouvait pas donner un fils à l’Empereur et, Metternich, chancelier de cour et d’Etat de l’Autriche, voyait d’un bon oeil une alliance dynastique pour ne pas fragiliser la paix signée entre la France et l’Autriche. En 1810, malgré ses réticences, Marie-Louise épouse Napoléon. Charles-Eloi Vial note justement : « Sur la scène européenne, le mariage de Napoléon avec la fille des Césars fut autant un coup d’éclat qu’un coup de génie diplomatique ». En épousant une descendante de Marie-Antoinette, Napoléon est parvenu à se donner une légitime supplémentaire aux yeux des souverains européens.
Cet ouvrage fourmille d’anecdotes sur la vie du couple impérial. Nous y apprenons surtout que l’Empereur a aimé Marie-Louise et que cette dernière lui a bien rendu. La description de la nuit de noces des deux tourtereaux est un régal. Nous découvrons également une femme de pouvoir authentiquement européenne, qui a appris le français, l’italien et le hongrois, qui aime jouer de la musique et écrit une correspondance au style soigné.
Elégance et déchéance
De l’Autriche jusqu’aux Tuileries et au duché de Parme, Marie-Louise n’a cessé d’être fidèle. A sa famille comme à l’Empereur. Mais les défaites de Napoléon ont sonné le glas de leur relation. Suite à son exil sur l’île d’Elbe, l’Empereur ne revit plus sa femme. Même durant les Cent-Jours. Il n’en a pas fallu davantage pour aiguiser la haine de ses détracteurs qui purent l’accuser de trahison.
« Tout respirait autour d’elle la régularité, le respect envers son petit peuple et le constant désir de remplir tous les devoirs de sa petite royauté ».
L’existence de Marie-Louise se confond avec le destin de l’Europe. Elle en a épousé chaque tumulte. Des guerres napoléoniennes jusqu’à l’Italie carbonariste. Son existence n’a été qu’un bouleversement perpétuel. En filigranes, nous comprenons qu’elle percevait le tragique de l’Histoire et qu’elle l’acceptait. Marie-Louise n’était pas Antigone. Dans ses Mémoires d’un royaliste, le compte Alfred de Falloux raconte sa visite à l’ancienne impératrice devenue duchesse de Parme : « Tout respirait autour d’elle la régularité, le respect envers son petit peuple et le constant désir de remplir tous les devoirs de sa petite royauté ».
Marie-Louise a été bien plus que la deuxième femme de l’Empereur. Elle a été une femme d’Etat ainsi qu’une mère dévouée à son fils. Charles-Eloi Vial conclut ainsi son portrait : « Sa grande réussite fut de choisir la voie de la modération au lieu de céder à une politique trop facile de répression comme l’aurait souhaité Metternich. (…) En France comme à Parme, conscience d’avoir un rôle à jouer dans la politique de son temps, elle se battit constamment pour défendre sa famille tout en protégeant les intérêts de ses enfants ». Alors que le statut de la Première dame fait de nouveau polémique, pourquoi ne pas s’inspirer de Marie-Louise ?
Liens
Marie-Louise, aux éditions Perrin
Notre article sur Les Derniers feux de la monarchie, de Charles-Eloi Vial