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Un étudiant de quarante ans (sic) a été neutralisé mardi 6 juin après avoir tenté d’agresser un policier sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame. Un symbole fort que les experts auto-proclamés ne semblent pas percevoir. 

Les formules creuses et pathétiques n’ont d’ailleurs pas tardé à fuser sur les chaînes d’information. Il a même été dit, sur BFM TV : « L’Etat islamique agit selon le même principe qu’Uber. Il s’agit d’une plateforme ». Il ne s’agissait pas seulement de l’exhibition, presque cynique, du voyeurisme de notre époque, mais aussi de la vacuité du commentaire qui cherche à mettre des mots là où n’est plus possible d’utiliser des qualificatifs. La seule préoccupation des journalistes semblaient, d’ailleurs, se porter sur le sort des touristes, comme si Notre-Dame n’était qu’un simple musée que les badauds venaient visiter comme le dernier train fantôme de Disneyland.

« L’acte est moins atroce qu’à Saint-Etienne-du-Rouvray, mais il n’en est pas moins révélateur d’une attaque contre ce que la France ne pense plus être ».

Comme l’a montré Alain Finkienlkraut dans La Seule exactitude, l’ennemi nous a une nouvelle fois définis. Communiqué après communiqué, l’Etat islamique ne cesse de vitupérer contre « les adorateurs de la Croix » et les « mécréants », en saupoudrant leurs appels au djihad de versets coraniques qui poseront toujours souci aux analystes. Attaquer Notre-Dame, symboliquement, revient à attaquer le cœur battant de la France édifiée par deux millénaires de christianisme. L’acte est moins atroce qu’à Saint-Etienne-du-Rouvray, mais il n’en demeure pas moins révélateur d’une attaque contre ce que la France ne pense plus être.

La légèreté de Quasimodo

Notre-Dame est aussi un monument littéraire. Un théâtre hugolien. Dans l’œuvre de Victor Hugo, ce H majestueux qui surplombe Paris concentre le sublime (la grâce d’Esmeralda, la beauté de son architecture) et le grotesque (la difformité du sonneur de cloche, les vicissitudes de Frollo) et cette confrontation était également présente, en ce mardi 6 juin. Il y avait le Beau, à travers ces fidèles émerveillés par cette splendeur. Il y avait aussi le Mal, incarné par ce lâche combattant. Le tragique, aussi, avec cette succession d’attaques. Et le comique, enfin, si l’on songe à ce malfrat qui s’attaque à Notre-Dame armé de son marteau ridicule. Une fin d’après-midi hugolienne.

« Cette délicatesse, cette douceur, cette grâce qui caractérisent cet « à peu près », il faut impérativement s’en souvenir ».

Il faut se souvenir, ici, des pages de Victor Hugo consacrées au Bossu qui grimpe, crapahute, marche, vole sur Notre-Dame. Par bien des aspects, Quasimodo est l’emblème d’un art de vivre français, dans sa légèreté, dans sa passion, dans son attachement à la pierre. Il est cabossé, mais il aime et vit en s’élançant de gargouille en gargouille pour voir sa belle danser en contrebas. Il y a, en effet, de quoi exciter la haine de ces fanatiques enfermés dans la pesanteur de leur obscurantisme.

Cette délicatesse, cette douceur, cette grâce qui caractérisent cet homme né difforme, il faut impérativement s’en souvenir. Face à cette menace constante qui pèse sur le monde entier, le sourire de Quasimodo en haut de sa tour, simplement heureux de voir une bohémienne danser, est une réponse possible à cette violence que l’ennemi nous impose.

Notre-Dame, allégorie du plus grand auteur français. Notre-Dame, symbole de nos racines chrétiennes. Notre-Dame, emblème de la France. « Les plus grands produits de l’architecture sont moins des œuvres individuelles que des œuvres sociales ; plutôt l’enfantement des peuples en travail que le jet des hommes de génie », écrivait Hugo à propos de l’édifice. Prions pour que le sourire de Quasimodo irradie toujours la Ville Lumière.

 

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Julien Leclercq

Fondateur du Nouveau Cénacle et auteur de "Catholique débutant" paru aux éditions Tallandier.

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