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La feuilleton agite le monde médiatico-politique depuis sa défaite de mai 2012. Reviendra, reviendra pas ? Nicolas Sarkozy est sur toutes les lèvres, même lorsqu’il se tait. Si son désir de revanche ne fait plus beaucoup de doutes, sa victoire est tout sauf acquise. 

Depuis ses adieux aux militants UMP au soir de sa défaite de 2012 face à François Hollande, Nicolas Sarkozy ne cesse de répéter qu’il se tient à l’écart de la vie politique. Ses « visiteurs du soir », qui se bousculent rue de Mirosmenil, ne cessent pourtant de jouer une autre partition de deux ans, à savoir la probabilité que Nicolas Sarkozy revienne dans l’arène à l’issue des élections européennes – a priori favorables au Front National – pour être le rempart contre Marine Le Pen et pour terrasser François Hollande.

La guerre contre les moulins à vent de 2012

En réunissant presque 49% des voix, Nicolas Sarkozy a évité la déroute face à François Hollande, candidat qu’il a certainement sous-estimé. Mais en adoptant ce que la presse a appelé la « ligne Buisson », il n’a fait que combler son retard dans les sondages (d’ailleurs, une étude officieuse et peu connue, arrivée sur le bureau des candidats le samedi 5 mai, montre que Nicolas Sarkozy était devant le candidat socialiste), en choisissant de s’en prendre tour à tour à Schengen, aux médias, aux syndicats, et aux « angles morts de la gauche », à savoir le sentiment d’insécurité, les angoisses du périurbain et les problématiques liées à l’immigration. 

Toutefois, cette stratégie frontale a connu ses limites. S’il a perdu en 2012, c’est parce qu’il est parvenu en quelques mois à liguer les journalistes, les corps intermédiaires et une partie de son camp contre lui. L’abstention l’a fait perdre parce que l’abstention provient de cet acharnement médiatique de cette presse libérale-libertaire qui compose à 99% le paysage médiatique français qui a coups de slogans et d’affaires fumeuses ont provoqué le doute dans la conscience d’une partie de l’électorat. Nicolas Sarkozy, en démarrant sa campagne tardivement, s’est attaqué trop vite et trop seul au mastodonte du spectacle – dont il s’est tant servi – qui s’est finalement retourné contre lui.

Cette mort symbolique du conseiller du Prince laisse un boulevard à la « ligne Juppé-NKM-Baroin » pour 2017.

Les syndicats ont fait voler en éclats leur prétendue neutralité en appelant à voter à gauche et l’inculture journalistique a fait le reste, dégainant les expressions creuses de « droitisation » ou « ligne Buisson » pour mieux caricaturer un programme qu’un électeur du RPR aurait sans doute qualifié de « light » dans les années 90. Avec les derniers « scoops » sur ses écoutes, ses supposés trafics d’influence ou l’énième rebondissement concernant le financement de sa campagne de 2007 par Kadhafi, tout porte à croire que les moulins à vent se remettront à tourner pour repousser ce dérangeant petit bourgeois parvenu qui défrise la moustache de Plenel.

La trop grande tentation Alain Juppé

Exit Buisson et son dictaphone. Le sulfureux conseiller s’est suicidé politiquement tout seul, en enregistrant les conversations privées avec le Président. Alors certes, nous pouvons ergoter sur la finalité de ces enregistrements, à savoir le travail d’un historien qui aurait voulu consulter ses archives, mais ces écoutes ont fuité et ce « système » que Buisson abhorre tant a eu sa peau et l’a mis aux bans de la vie politique, ainsi qu’elle le désirait depuis des années. Il lui fallait le scalp de ce galeux, désormais contraint au silence et à l’influence réduite à néant.

Cette mort symbolique du conseiller du Prince laisse un boulevard à la « ligne Juppé-NKM-Baroin » pour 2017. Des trois droites étudiées naguère par René Rémond, il ne reste plus à Nicolas Sarkozy que la « branche » orléaniste, bourgeoise, libérale et européiste, pour récolter des soutiens. Tout ce qu’incarnait Buisson – la tentation bonapartiste en faisant campagne directement « au peuple » sans passer par les corps intermédiaires et un certain légitimisme – est enterré. Or le peuple ne veut pas de la politique de Merkel ni des injonctions de Barroso. Ni des « frontières ouvertes » et n’a que faire de la novlangue progressiste qu’une certaine droite rend majoritaire au sein de l’UMP ; et le peuple choisira comme en 2012 : l’abstention ou le vote protestataire. 

En résumé, seul contre tous, Nicolas Sarkozy ne peut espérer l’emporter au deuxième tour. Il lui faudra des alliés, mais ces derniers le feront échouer. Dans tous les cas, il sera dans la nasse. A lui de se réinventer, et de trouver les bons généraux pour mener ce qui pourrait ressembler à sa dernière guerre.

Julien de Rubempré

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Julien Leclercq

Fondateur du Nouveau Cénacle et auteur de "Catholique débutant" paru aux éditions Tallandier.

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