Une voix singulière. Des traits affirmés et émaciés. Un sourire carnassier et infiniment masculin, par-delà le goût passé du génie pour l’androgynie.
Une personnalité somme toute peu médiatisée, attirée par la discrétion, mais paradoxalement omniprésente. Une aura et une puissance rares.
« Un artiste unique et comme cette humanité en carence chronique de maestria n’en fera sans doute plus ».
Disparu hier, une poignée de jours après la sortie d’un dernier album à son image d’ex-futur septuagénaire, accompli, expérimental, mature, avant-gardiste et finalement visionnaire, David Bowie laisse un vide artistique abyssal. Mélange de raffinement et de subversion, il restera un talent pur et absolu. Un être d’antagonismes, inclassable et empreint de classe, programmé pour créer.
Un chanteur surdoué, tout en panache et en maîtrise, qui n’avait pas son pareil pour toujours se réinventer et pour mettre au point des personnages aussi rocambolesques qu’intemporels. Un géant viscéralement atypique. Un artiste unique et comme cette humanité en carence chronique de maestria n’en fera sans doute plus. Elle ne s’y est du reste pas trompée vu la déferlante d’hommages de musiciens et d’anonymes du monde entier.
David Bowie, l’empereur de la métamorphose
David Bowie, c’est un demi-siècle de carrière, de rebondissements, de réadaptations, d’une imagination débordante et d’une capacité salutaire à être à la pointe de son temps.
« David Bowie, c’est un écorché vif doublé d’un gentleman, un jour soul, un autre jour funk, un jour glam rock, un autre jour pop ».
C’est une vie de styles, de délectables palinodies, de conceptions et d’approches musicales. Une certaine idée du sexe aussi, mais, par-dessus tout, le parfait syncrétisme entre la décadence volontiers insouciante des années 1970 et une perception relativement détachée d’un XXIe siècle en mal de repères et de certitudes.
David Bowie, c’est un écorché vif doublé d’un gentleman, un jour soul, un autre jour funk, un jour glam rock, un autre jour pop. Un compositeur, un acteur. Un Londonien, un Berlinois, un New Yorkais. L’empereur de la métamorphose. Le paroxysme permanent.
Space Oddity, The Man who sold the world, Life on Mars, Changes, Heroes, China Girl, Let’s Dance, Ashes to Ashes, This is not America. Autant de tubes brillants, profonds, empanachés, “crachés” avec les tripes et le brio de ceux qui ne savent que viser juste. Des chansons qui lui survivront. Aussi sûrement que le mythe David Bowie survivra à cette époque qui, du coup, ne nous a peut-être jamais parue aussi vide de terriens d’exception.