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Dans On est pas couché, Yann Moix a offert à Laurent Ruquier le premier « clash » de la saison face à Michel Onfray, avec, visiblement, bien des rancœurs passées entre les deux hommes.

Gauche, migrants, géopolitique : chaque sujet a été bon pour opposer Moix et Onfray en ce samedi soir, avec la figure tutélaire de BHL derrière chaque argument. Le nietzschéen normand avait visiblement une dent contre Moix, remettant à plusieurs reprises en cause ses capacités à élaborer une réflexion : « Vous êtes romancier, ne vous essayez pas à la pensée », lui a-t-il notamment asséné, comme si la philosophie était son apanage à lui et à lui seul, le pourfendeur de Bernard-Henri Lévy, qui passe de plateau en plateau pour se plaindre de l’omniprésence médiatique de son double maléfique.

Onfray n’a pas le droit de se plaindre : son rond de serviette chez Ruquier en est d’ailleurs la preuve irréfutable.

Onfray a d’ailleurs longuement ciblé Laurent Joffrin, à cause de la une de Libération le concernant. Sans toutefois prendre la défense de Joffrin, il est toutefois logique qu’un journal qui se réclame de la gauche – même si cela n’est absolument plus perceptible aujourd’hui – s’interroge sinon sur la mue idéologique, du moins sur le revirement de son ancienne icône libertaire qui se fait désormais tresser des lauriers par Eric Zemmour dans Le Figaro magazine.

Léa Salamé a d’ailleurs beau jeu de lui rappeler qu’au simple niveau du temps d’antenne, Onfray n’a pas le droit de se plaindre : son rond de serviette chez Ruquier en est d’ailleurs la preuve irréfutable. Mais la principale raison du débat houleux entre les deux hommes était sur un concept, « le peuple », qu’Onfray n’a pas vraiment su définir alors que Moix a battu en brèche.

Le peuple d’Onfray est-il le peuple ?

L’électeur de droite, implicitement, ne serait pas du peuple selon les lumières de l’anti-BHL.

Yann Moix avait donc décidé de laisser de côté la connivence qu’il a pu afficher avec Michel Houellebecq ou Christine Angot pour taquiner Onfray : « Le peuple, mais quel peuple ? », ce à quoi le normand répond en invoquant les mânes de Michelet « Le peuple, c’est celui qui ne décide pas ». En d’autres termes, le peuple d’Onfray serait cette masse opprimée par le système médiatique.

Relancé par Léa Salamé sur sa conception du « peuple old school », le philosophe anti-capitaliste – qui est pourtant très actif sur Twitter, réseau éminemment représentatif du Capital – confie sa nostalgie des anciens vendeurs de l’Huma, les communistes, forcément animés de la plus grande des solidarités. En creux, il indique bien que le peuple serait forcément la gauche, soucieux de la gauche, désireux de la gauche et déçu par la gauche. L’électeur de droite, implicitement, ne serait pas du peuple selon les lumières de l’anti-BHL.

Comme nous l’avions vu pour son essai consacré à Don Quichotte, Onfray continue de voir du Onfray partout. Et il perçoit du Onfray dans le peuple, comme Michelet voyait l’Histoire selon Michelet. Et si le peuple était avant tout une conception personnelle ? Quid du cadre moyen, non-prolétaire, qui ne vote pas et lutte malgré tout pour tenir jusqu’à la fin du mois ?

Poussé dans ses retranchements, Onfray se révèle tel qu’il est : un historien de la philosophie médiatisé, habile pour parler des autres, mais qui n’a toujours pas ébauché le moindre concept singulier.

Julien de Rubempré

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Julien Leclercq

Fondateur du Nouveau Cénacle et auteur de "Catholique débutant" paru aux éditions Tallandier.

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