Partagez sur "Exposition – « ABRACADABZTRACT » à la galerie LE PARIS URBAIN"
Avec ses créations les plus récentes, Zokatos nous surprend à nouveau. Lui l’adepte du langage abstrait, non content d’avoir présenté toutes ses œuvres sous le vocable mystérieux de « abztract », le voilà qu’il propose pour son actuelle exposition un nouveau néologisme grâce à l’adjonction du préfixe « abracad ».
Pratiquement imprononçable voire incompréhensible… ce mot nouveau a pourtant une signification. Il a été créé pour désigner une nouvelle réalité.
« Abracad » est la contraction de « abracadabra» qui est un mot mystique, une sorte d’incantation adressée aux puissances paranormales ou surnaturelles et donc le peintre nous invite à accéder à un univers magique, le sien !
Edna et Samia de la galerie Le Paris Urbain dans le 10° arrondissement ont permis à cet artiste du street art d’exposer ses œuvres les plus récentes dans les deux niveaux qu’offre ce superbe lieu : un rez-de-chaussée accueillant et ouvert avec au sous-sol une belle cave voûtée conviviale.
Sans dévoiler l’intégralité des œuvres exposées, voici en guise de préliminaire, avant d’aller voir sur place jusqu’au 17 mai 2014 cette belle exposition, quelques pièces qui méritent des commentaires particuliers.
« UNE MYRIADE DE REVES »
On retrouve dans cette œuvre réalisée à la bombe aérosol le travail de Zokatos, artiste du street art.
« Mon but aujourd’hui (disait-il en 2010) est d’apporter dans la rue ce qu’il y a pas ou peu : l’abstrait. Je travaille à 90 % avec des outils du graffiti : marqueurs, encres pour graff, bombes aérosols … »
Depuis 2009 notamment, on observe des représentations de formes complexes qui s’enchevêtrent comme investies d’une charge électrique.
Les formes virevoltent joyeusement dans l’espace de la toile.
La vie qui remue interdit tout temps d’arrêt. Elle permet l’embrassement des sens au-delà de tout équilibre arrêté.
Est-ce la couleur ou la forme qui donne toute cette vitalité ?
En fait les deux à la fois dans ce grouillement infini et continu.
« NOUVELLE PLÉIADE »
Dans la Nouvelle pléiade, l’artiste veut dépasser les frontières de la peinture et de l’écriture.
Il propose une réduction des formes et des concepts aux éléments primaires du signe pour trouver une forme hybride entre peinture et écriture.
Ici effectivement, il ne s’agit plus exactement ni de l’un ni de l’autre mais bien d’une synthèse d’un autre genre.
L’inspiration de Zokatos vient-elle des hiéroglyphes égyptiens, des pictogrammes japonais, chinois ou mayas ou des indiens d’Amérique du Sud ?
En tout cas le résultat de son travail s’avère prometteur puisqu’on découvre chez lui des symboles totémiques donnant vie, une réalité propre, un idiome capable de toucher le plus grand nombre.
Et au final un langage visuel qui traduit le rythme frénétique de notre époque.
« REQUIEM FOR A RHYME »
Requiem for a Rhyme est un hymne adressé à la matière.
Très imprégné par l’Action Painting, Zokatos s’adonne au plaisir jouissif de l’acte pictural.
Il exprime sa joie mais aussi sa fureur à travers une technique séduisante.
Le style est très expressionniste, les projections et éclats de peinture ne sont que les pures manifestations de la vie.
Son œuvre est très centrée comme si tout provenait d’un centre mythique, le lieu du big bang à l’origine de tout.
Il expérimente le « hasard dirigé » comme l’a défini Max Ernst et comme le dira également Pollock lui-même :
« Là (au sol), je suis plus proche du tableau, j’en fais plutôt partie. Je peux tourner autour, y travailler des quatre côtés et être littéralement dedans. C’est un peu comme ça que travaillent les Indiens de l’Ouest lorsqu’ils réalisent leurs peintures de sable. »
« DES PAPILLONS DANS LE VENTRE »
Zokatos retrouve des motifs joyeux dans cette composition qui peut être considérée comme festive.
Signe et écriture tendent à s’y confondre. Cette « écriture griffée » met l’accent sur le rythme, c’est une danse, une farandole, proche d’une vraie poésie :
« …celle, selon Dotremont, où l’écriture a son mot à dire. La vraie poésie est aussi celle qui va hors de moi pour nous revenir, et ne passe par le rabot du langage que pour nous coucher, elle et moi, dans les copeaux légers de notre amour. »
Un vrai incendie symbolique où le geste de l’artiste laisse chanter les couleurs en même temps qu’il laisse circuler frénétiquement les signes.
« MISE EN ABYME »
« Mise en abyme » apparaît comme une perle rare, un joyau d’une grande valeur parmi les œuvres récentes réalisées par Zokatos.
Pierre Alechinsky déclarait que « rien n’est plus concret que ces peintures dégagées du scénario, que ces peintures dont l’acte de penser et de peindre se chevauchent, s’interpénètrent. »
A ce titre on peut définir cette œuvre comme le résultat d’une vraie poétique qui éclaire de l’intérieur, comme un cœur qui bat au rythme de ses pulsations.
Les couleurs sont restituées dans leur plus bel apparat comme ces rouges, ces verts et ces bleus.
Tout frémit et respire d’une richesse intense.
Et pour couronner le tout, la couleur donne également sa vitalité au mouvement.
« DES ANIMAUX EN NUAGES »
L’ardoise d’écolier qu’utilise l’artiste pour créer son aquarelle est une invitation au monde de l’enfance.
L’œuvre qui s’intitule « des animaux en nuages » trace la voie d’une rêverie sous forme poétique vers l’enfance.
L’enfance est vue comme un art populaire ou comme un nouveau primitivisme.
A ce titre l’aquarelle est très proche d’un travail effectué par Dubuffet.
En fait il s’agit toujours pour Zokatos, grâce à l’enfance, d’effectuer un perpétuel retour aux sources.
Et c’est donc la primitivité qui donne vie à son art !
Christian Schmitt