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Malgré les rumeurs qui ont agité les médias et les réseaux sociaux, l’émission de Canal + sera toujours diffusée à la rentrée.

Vincent Bolloré aurait indiqué que Les Guignols de l’info ne seraient pas reconduits à la rentrée : il n’en suffit pas plus pour mettre en émoi à la fois la presse, les membres du gouvernement jusqu’au Premier ministre. Alain Juppé en changea même de photo de profil sur Twitter, et l’inénarrable Bruno Roger-Petit ne mit pas longtemps à y voir un coup monté de la Sarkozie. La rumeur aura au moins eu le mérite de souder la gauche française. Joli coup de communication ou pas pour redonner un peu d’éclat à un format vieillissant, le coup a fonctionné puisque la mobilisation, a battu son plein.

Les Guignols de l’info et le soutien émotif

C’est la nouvelle tendance qui émerge depuis l’avènement des réseaux sociaux. Tout devient objet de contestation, de soutien, de hashtags et autres bannières pour sommer le citoyen 2.0 de choisir un camp. C’est le règne non seulement de l’instantané mais surtout de son corollaire : l’émotivité. Comme des adolescents à qui des parents refusent l’achat d’un nouveau scooter, tout devient prétexte à la grosse colère sur Twitter. Cela a donné la campagne « Not in my name » comme le si fragile slogan appelant à devenir Charlie, pour préserver cet esprit de la dérision qui n’est pourtant autorisé qu’à une certaine partie des gens.

Le Bébête Show a disparu – paix à Jean Roucas – et la télévision française n’est pas décédée pour autant. Même Michel Drucker arrêtera un jour de poser son auguste séant sur son fauteuil écarlate. Il en va des programmes TV comme du refrain populaire qui s’en va et qui revient. Une émission télévisée est périssable, et ce soutien « affectif » aux marionnettes fait songer aux enquêtes d’opinion qui placent les émissions d’ARTE et de France 5 en tête des études qualitatives alors que tout le monde préfère chanter les sardines avec Patrick Sébastien le samedi soir venu.

L’humour politique, celui des chansonniers, ne fait plus rire personne et encore moins les jeunes puisque ces derniers ne savent même plus de qui il est question dans ces sketchs. Pire encore : rigoler des puissants, soit, mais que reste-t-il à moquer lorsque nos élus n’ont jamais été aussi faibles ?

Les Guignols ou la dérision normative

Le succès de la campagne de Jacques Chirac en 1995 est devenu un cas d’école dans les écoles de communication. Avec son slogan « Mangez des pommes » répété à l’envi dans les Guignols, l’émission lui aurait donné un côté sympathique qui lui aurait permis de gagner des points sur l’austère Edouard Balladur. Les Guignols de l’info seraient un programme prescriptif, parce que les honnêtes gens, naïfs par nature, aiment croire aux personnages en plastique.

Il s’agit de tout sauf d’un média corrosif ou insolent comme nous l’avons entendu. Les Guignols offrent depuis plus de quinze ans un ricanement pour le Progrès, pour le Bien.

Les Guignols constituent année après année un format avant tout idéologique, politique, philosophique. Entre les socialistes croqués au mieux en gentils benêts et Nicolas Sarkozy associé à l’escroquerie (voire pire avec Brice Hortefeux flanqué d’un berger allemand alors qu’il était Ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Codéveloppement) ou les Le Pen assimilés aux nazis, la différence de traitement est perceptible et pour le moins suspecte.

Il s’agit de tout sauf d’un média corrosif ou insolent comme nous l’avons entendu. Les Guignols offrent depuis plus de quinze ans un ricanement pour le Progès, pour le Bien. De la pure dérision normative dans la mesure où il s’agit de désigner un bouc émissaire mal-pensant au peuple de Canal +.

Avant une prochaine lutte numérique pour une noble cause, que nos Ulysse 2.0 se rassurent : les antifascistes en latex seront toujours présents à la rentrée. 

 

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Julien Leclercq

Fondateur du Nouveau Cénacle et auteur de "Catholique débutant" paru aux éditions Tallandier.

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