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Le 8 mars 2014 disparaissait le vol MH370 de la Malaysian Airlines avec 239 personnes à bord. Plus d’un an après les faits, les doutes ne sont toujours pas levés, très loin de là, sur les circonstances de ce qui s’apparente à une évaporation. Guillaume Duhamel, après avoir étudié toutes les théories, nous livre son enquête.

C’est sans doute le plus grand mystère de l’histoire de l’aéronautique civile. Plus encore que les accidents du vol 1611 d’Air France en 1968 et du vol 800 de la TWA vingt-huit ans plus tard, deux avions dont il est très vraisemblable qu’ils ont en réalité été abattus par erreur. Un mystère entretenu par de graves impairs de communication, notamment de la Malaysian Airlines et des autorités du pays, et par des silences assourdissants, celui des Etats-Unis en tête, provoquant la colère légitime des familles des présumés disparus. En sus de la médiatisation importante que provoque toujours une catastrophe aérienne, à plus forte raison lorsque son déroulement échappe à toute clarté et peut-être, dans ce cas précis, à toute rationalité…

M6 a consacré avant-hier un documentaire à cette tragédie sans précédent, survenue à une époque où la technologie aéronautique atteint des sommets de fiabilité, même si elle demeurera toujours moins efficace que la raison d’Etat. Des théories plus ou moins recevables, mais qui méritent d’être explorées, ont fleuri depuis cette incroyable « affaire », alimentées par l’enlisement de l’enquête officielle et par une succession d’annonces bien hasardeuses, avec de surcroît un timing déconcertant, mais même un scénariste à l’imagination fertile n’aurait peut-être pas imaginé ce qui s’est réellement produit…

Diego Garcia, un objectif (trop ?) difficile d’accès

Le débranchement du transpondeur et celui autrement plus fastidieux du système ACARS (Aircraft Communication Addressing and Reporting System) semblent exclure les théories d’un avion victime d’un incendie ou frappé par la foudre. Ils suggèrent que l’équipage ou un voire plusieurs terroristes très bien (in)formés ont manipulé le Boeing 777 afin de le faire voler « en catimini ». Divers signaux émis par un petit boîtier situé dans la soute, à l’existence inconnue sauf des experts aéronautiques, auraient par ailleurs révélé, certes plusieurs semaines après les faits, que l’appareil, qui devait rallier Pékin au départ de Kuala Lumpur, soit une distance d’environ 4 400 kilomètres, a totalement dévié de son plan de vol, mais vers le Nord, et non vers le Sud comme l’a prétendu le gouvernement malaisien.

Ce « cabotage aérien », sans jamais violer d’espace, est en lui-même on ne peut plus suspicieux, mais donne à penser qu’en cas de velléité d’attentat terroriste, elle ne concernait peut-être pas le « hub » militaire de l’US Air Force dans l’océan Indien.

Pourquoi tout mettre en œuvre pour effacer la signature radar ? Quel était le dessein de celui ou de ceux qui ont pris les commandes ? Peut-il s’agir d’un suicide du pilote ou du copilote, suivant le triste exemple récent d’Andreas Lubitz ? Auquel cas, force est d’admettre que celui qui a voulu mettre fin à ses jours et associer deux cent trente-huit personnes à son sinistre projet, éventuellement en les exécutant avant le crash (via une dépressurisation volontaire, voir ci-dessous), a pris tout son temps… Et qu’il a effectué un piqué parfait en l’occurrence tout à fait inutile. Par ailleurs, les errements indiscutables des gouvernements concernés tendent à invalider cette issue.

D’aucuns ont suggéré une attaque de la base aérienne américaine de Diego Garcia, véritable Fort Knox militaire, une cible de choix pour des terroristes, mais tellement protégée que leur action n’aurait de toute façon pas pu aboutir.

Cette hypothèse comporte de surcroît une faille majeure : le kérosène. Si, en ligne droite, la distance qui sépare la capitale malaisienne de Diego Garcia n’est que de 5 450 kilomètres (soit une réserve de carburant pour un millier de kilomètres tout à fait réaliste), les signaux du boîtier ont montré que le Boeing 777 a « serpenté » en direction des côtes thaïlandaises et au surplus des Maldives. Pas franchement le chemin le plus direct, et cette trajectoire sous-entend une quantité de kérosène considérable pour un vol de cette longueur, même si des contacts satellitaires ont indiqué qu’il a continué à sillonner les airs pendant six longues heures et que l’appareil disposait d’une autonomie de huit heures aux dires du consultant aéronautique Gérard Feldzer. Ce « cabotage aérien », sans jamais violer d’espace, est en lui-même on ne peut plus suspicieux, mais donne à penser qu’en cas de velléité d’attentat terroriste, elle ne concernait peut-être pas le « hub » militaire de l’US Air Force dans l’océan Indien.

Un brevet convoité…

Quatre des cinq individus titulaires du brevet sont des employés de Freescale Semiconductor à Austin (Texas) et le brevet a été partagé en cinq parties de 20% pour chaque titulaire

Puisque soupçon tenace de déroutement ou de détournement il y a, il convenait quoi qu’il en soit de s’intéresser aux passagers. Or figurait parmi eux vingt employés, douze Malaisiens et huit Chinois, appartenant à la même société, Freescale. Coïncidence particulièrement troublante, celle-ci aurait tout juste déposé un brevet ayant trait à une micro-puce électronique d’une redoutable efficacité, puisque permettant rien de moins que de faire disparaître un gros porteur des écrans radars…

Aucune entreprise dite « responsable » ne prend le risque de faire voyager autant de ses forces vives dans un même avion. A ce constat qui n’aura lui non plus jamais de justification satisfaisante s’ajoute le fait que ledit brevet aurait été approuvé officiellement quatre jours seulement après la disparition du vol  MH370…

« Quatre des cinq individus titulaires du brevet sont des employés de Freescale Semiconductor à Austin (Texas) et le brevet a été partagé en cinq parties de 20% pour chaque titulaire. Si quatre des titulaires meurent, le dernier dispose de l’intégralité des profits accumulés par le brevet et celui-ci n’est autre que Freescale », soutiennent certains « conspirationnistes », selon l’adjectif consacré. Partant de là, il ne serait plus incongru de se demander si le groupe texan n’a pas précipité ses génies dans l’océan pour « toucher le jackpot ». Reste à savoir comment et par quel biais, considérant tout de même que la sécurité n’est pas le fort de l’aéroport de Kuala Lumpur, ce qui élargit le champ des possibilités pour une initiative inavouable.

Autre hypothèse : le Boeing 777 a été détourné par un terroriste agissant pour le compte d’un pays, apte à piloter un tel aéronef, acheté à prix d’or et ayant eu connaissance de la présence à bord des salariés de Freescale, ce qui implique le déploiement de moyens logistiques et financiers colossaux en amont. Cet Etat pourrait-il être la Chine, alors que de nombreux citoyens de l’Empire du Milieu ont embarqué sur le vol MH370, dont une partie employés par l’entreprise susnommée ? Le fait est que Pékin s’est beaucoup exprimé dans les jours suivants le drame, admonestant notamment les autorités malaisiennes, il est vrai très déficiantes, avant de s’emmurer dans le silence, comme si le gouvernement chinois avait été mis au pas…

Peut-il s’agir de la Russie, qui dans un contexte de net refroidissement des relations diplomatiques avec le monde occidental aurait pu trouver un intérêt supplémentaire à tenter de mettre la main sur le fameux brevet ou, à défaut, à empêcher son dépôt ? Indépendamment des ambitions élevées qui ont toujours animé Vladimir Poutine et de sa volonté indéfectible de replacer son pays en rival numéro un des Etats-Unis, une chose est sûre : ces deux entreprises auraient été vouées à l’échec.

Washington instille le doute

Freescale et son brevet n’en semblent pas moins, sinon la clef, à tout le moins un élément capital de ce drame. Le caractère imminent de sa validation attesterait de l’efficacité de la technologie qu’il protège et on peut aussi supputer que cette dernière a été expérimentée sur le Boeing malaisien, de gré ou de force. L’avion aurait auquel cas déjoué toutes les surveillances connues et, après avoir été détourné, ce qui ne fait plus guère de doute aujourd’hui, se serait écrasé quelque part, dans l’océan ou ailleurs, abattu ou à court de carburant. Sauf qu’aucun débri n’a officiellement été retrouvé et qu’aucun témoignage en ce sens n’a émergé.

Cette discrétion dont l’Oncle Sam n’est guère coutumier sème le doute, tout comme le silence soudain de la Chine, évoqué plus haut, et les atermoiements des pouvoirs publics malaisiens

Aurait-il pu alors atterrir sans encombre, à un endroit officiellement inconnu ? Si jamais, quel sort le pays commanditaire du détournement aurait-il réservé aux passagers et aux témoins ? Peut-on sérieusement envisager la faisabilité du sacrifice pur et simple de plus de deux cents innocents à l’abri de tous les regards, ainsi que la réduction au silence d’éventuels témoins, au nom de la sauvegarde ou de la (tentative de) neutralisation d’un brevet, aussi révolutionnaire soit-il, au moins sur le papier ?

Cela semble surréaliste, tout comme le fait que le MH370 ne soit autre que le MH17, un autre Boeing 777 de la Malaysian Airlines, abattu dans le ciel ukrainien le 17 juillet dernier. Le gros porteur aurait alors été caché durant plusieurs mois et « ressorti » en plein conflit ukrainien pour discréditer une Russie qui serait tombée dans un véritable traquenard… Quid en outre d’un détournement qui aurait mal tourné, avec des passagers qui se seraient révoltés, comme sur le célèbre vol 93, ou d’un « cercueil volant », suivant l’exemple du vol 522 d’Helios Airways, transformé ainsi après une dépressurisation ? Le premier cas de figure rend les bévues diplomatiques extravagantes et le second est très improbable au regard du parcours tortueux du Boeing malaisien. A moins que les passagers de l’appareil, qui aurait atteint ses limites physiques peu avant que sa trace soit définitivement perdue, aient été privés d’oxygène à très haute altitude tandis que les pirates enfilaient leur masque pour piloter sans encombre…

Subsiste une dernière possibilité, peut-être la plus effrayante… et la plus « tenable », avec celle d’une chute en angle droit aux causes inconnues, mais qui expliquerait elle aussi l’absence de traces de l’avion : une prise de contrôle à distance, techniquement possible, par un hacker particulièrement redoutable, puis la destruction de l’aéronef, devenu incontrôlable, probablement par les Etats-Unis, le vol MH370 détourné transportant un secret par trop précieux ou constituant une menace trop redoutable pour ne pas être en cas abattu tôt ou tard s’il venait à tomber dans de mauvaises mains. Une diplomatie fondée sur le chantage, l’intimidation et les menaces, notamment commerciales, à l’endroit des mieux informés et des plus curieux, aurait ensuite fait le reste.

On le voit, il y a de quoi se perdre en conjectures. Et si nul ne peut prétendre connaître la vérité, il est peu contestable que certains très hauts placés savent ce qu’il s’est véritablement passé. Un regain de conscience à l’approche du dernier souffle pourrait faire se délier quelques langues. En attendant, l’absence de débris déconcerte, tout comme le mutisme de Washington, flagrant lors de la visite de Barack Obama en Malaisie l’an passé. Le président américain n’a pas davantage évoqué officiellement le sujet lorsqu’il a reçu le Premier ministre Najib Razak, le conviant même à une partie de golf, un égard qui a alimenté les fantasmes.

Cette discrétion dont l’Oncle Sam n’est guère coutumier sème le doute, tout comme le silence soudain de la Chine, évoqué plus haut, et les atermoiements des pouvoirs publics malaisiens, lesquels ont annoncé laconiquement le crash de l’avion « quelque part dans l’océan Indien » fin mars 2014 dans une illusoire tentative de couper court à des doutes particulièrement prononcés et dérangeants. Le chef de l’exécutif avait auparavant attendu une semaine pour confirmer que l’avion avait été détourné de son plan de vol en direction de l’Ouest alors que les recherches s’étaient concentrées en mer de Chine méridionale, à l’Est, comme pour faire diversion…

Il faut enfin évoquer les « couacs » de la Malaysian Airlines, laquelle a notamment mis plusieurs heures à donner l’alerte et a grandement minimisé la quantité de batteries au lithium présente dans les soutes, un tour de passe-passe grossier et difficile à comprendre. Car si celles-ci peuvent exploser à la suite d’un mélange potentiellement explosif avec l’oxygène – des précédents de cargaisons meurtrières existent ici et là  –  , des morceaux d’avion auraient là encore sans doute été retrouvés, même dans des zones très profondes, à forts courants et particulièrement venteuses.

A-t-elle fomenté ce leurre vulgaire pour tenter de faire croire à sa responsabilité, téléguidée par l’Etat malaisien, lui-même sous la coupe des Etats-Unis ? L’appareil s’est-il abîmé dans une zone délibérément non explorée, avec des recherches aiguillées au plus haut niveau mondial ?

Le drame du MH370 a cela de plus atroce que les autres accident aériens qu’il n’exclut rien, et surtout pas le pire.

Guillaume Duhamel

 

 

Guillaume Duhamel

Guillaume Duhamel

Journaliste financier originellement spécialisé dans le sport et l'écologie. Féru de politique, de géopolitique, de balle jaune et de ballon rond. Info plutôt qu'intox et intérêt marqué pour l'investigation, bien qu'elle soit en voie de disparition.

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