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Une voix chaude, onctueuse, rassurante, parfois espiègle, souvent malicieuse, qui seyait avec son tempérament de pince-sans-rire.

Un personnage intemporel, haut en couleur, élégant et pétillant. Une sorte de grand-père idéal avec une bonhomie non feinte, une finesse d’esprit, une verve et une érudition qui font cruellement défaut par les temps qui courent. 

Jean Rochefort était tout cela à la fois. Un comédien hors pair, un homme instruit. Un magistral pédagogue. Un féru d’équitation aussi, sport qu’il commentait volontiers à la télévision dans un style inimitable, entre lyrisme contenu et capiteuses envolées savamment distillées. 

Brillant, Jean Rochefort, avec sa moustache caractéristique, véritable marque de fabrique, aura tourné dans pas moins de 150 films. De la génération de Philippe Noiret, dont la disparition l’avait meurtri, de Michel Serrault et de Jean-Pierre Marielle, il était l’un des derniers monstres sacrés. Un acteur génial, capable d’incarner un libertin cynique (Que la fête commence) un père adultérin (Un éléphant, ça trompe énormément) ou, plus récemment, un vieillard impavide et incontrôlable (Floride, son dernier film) avec la même maestria qui lui permettait de dégager empathie et affection par-delà la nature du rôle qu’il endossait.

Jean Rochefort, entre rêverie et sagesse

Césarisé à deux reprises, Jean Rochefort a connu le succès dès le début de sa carrière, dans les années 1960. L’enfant rêveur est progressivement devenu une sorte de sage (sans pour autant être réfractaire aux grivoiseries, loin de là), une figure paternaliste et flegmatique, une figure tout court. Une de ces personnalités qui font partie de notre quotidien et dont on pouvait parfois se dire qu’elles pouvaient survivre à tout et à tous. Un de ces hommes capables de s’adapter à son temps et de vulgariser des œuvres littéraires inestimables avec humour et dans un langage habilement fleuri, comme dans la série Les boloss des belles lettres.

Telle la clepsydre de Baudelaire qui se vide, le patrimoine culturel français, qui avait déjà perdu Jeanne Moreau, Claude Rich ou encore Mireille Darc il y a quelques semaines seulement, se dépeuple. Une génération superbe s’en va. 

Il n’existe pas l’ombre d’une chance qu’elle soit qualitativement remplacée de sitôt.
Guillaume Duhamel

Guillaume Duhamel

Journaliste financier originellement spécialisé dans le sport et l'écologie. Féru de politique, de géopolitique, de balle jaune et de ballon rond. Info plutôt qu'intox et intérêt marqué pour l'investigation, bien qu'elle soit en voie de disparition.

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