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Les semaines se suivent et ne se ressemblent pas pour Thomas Guénolé, parce que le génie est unique.

« La vie, ne m’apprend rien », chantait jadis Daniel Balavoine de sa voix suave et mélancolique mais, en écoutant Thomas Guénolé chaque matin chez Jean-Jacques Bourdin nous pouvons affirmer tout l’inverse : il nous apprend tout. Ou plutôt, il sait choisir les mots pour faire ressortir la vérité enfouie en nous grâce à son immense sagesse et sa sagacité dont l’éclat illumine les consciences des studios de RMC jusqu’aux amphithéâtres de Sciences Po.

Lundi : Thomas s’occupe de votre facture EDF

Il préfère Cécile Duflot à Robespierre et une éolienne à la guillotine (l’inverse fonctionne également).

Les grands de ce monde tremblent depuis que notre Divin Chauve délivre ses oracles chaque matin et en ce lundi, les oreilles de Jean-Bernard Lévy ont sifflé. En cause : la volonté de ce dernier d’augmenter les tarifs de l’électricité, ce qui, note judicieusement Thomas, « N’est pas rien pour les petits foyers ». Puisque Guénolé c’est du concret, comme le veut désormais l’adage popularisé par ses cohortes de fans, il y a donc une solution : produire son électricité soi-même, à condition que 1) Le coût de l’autoproduction soit inférieur à la facture et 2) Qu’il y ait assez de soleil sur toute l’année. Comme tout cela semble si simple, lorsque Saint Thomas nous expose ses divinations ! En résumé, il faut des panneaux solaires en France. Partout. Sur tous les toits. Et si possible, aussi luisants que le crâne de notre philosophe favori. « Il faut un modèle décentralisé » rajoute-t-il, pour ne pas que la grosse machine étatique se mette en route, ce qui fait implicitement de Thomas Guénolé un anti-jacobin écologiste parce que comme nous le savons tous : il préfère Cécile Duflot à Robespierre et une éolienne à la guillotine (l’inverse fonctionne également). Grâce à son intelligence nucléaire, Thomas Guénolé atomise les lobbies et autres conservatismes pour protéger Dame Nature. Qui lui rend si bien.

Mardi : Thomas offre le travail pour tous

Comment annoncer à un doctorant en histoire des Arts qu’il va à présent organiser des ateliers de slam à Bobigny pour gagner des clopinettes ?

Après le salaire pour tous, revoici notre Guide reprendre son antienne de la France all inclusive qui offre le gîte, le couvert, le toit et le salaire à tout le monde. Qu’on se le dise : Thomas Guénolé est un optimisme. Son seul but n’est pas de vous conseiller pour votre facture EDF, c’est votre vie dans son intégralité qu’il gère, conseille, jalonne de ses pensées les plus optimistes. Abolissons le chômage ! Tel est le slogan de Thomas ce mardi, et le fonctionnement en serait très simple : il suffirait aux pouvoirs publics de ne plus payer les allocations chômage pour financer un emploi dans une association ou dans la sacro-sainte « économie sociale et solidaire », se référant aux Ateliers nationaux de 1848 sans toutefois préciser combien ce grand humanisme a échoué car le travail ne s’invente pas et il qu’il a fallu réprimer violemment la gronde des ouvriers laissés sur le carreau au bout de trois mois. « Ce n’est pas le chèque et casse-toi, souligne-t-il à juste titre, c’est un travail d’utilité publique », précise-t-il. Seulement cette brillante idée aurait bien du mal à contenter les chômeurs car non, le chômeur n’est pas une entité abstraite qu’il faut invoquer en niant son individualité : et lorsque des visages sont mis sur ce mot-valise, on trouve un grand nombre de seniors, de jeunes diplômés, d’ouvriers qualifiés dont l’usine a été délocalisée.

Comment annoncer à un doctorant en histoire de l’art qu’il va à présent organiser des ateliers de slam à Bobigny pour gagner des clopinettes ? Comment contraindre un brillant menuisier à faire de l’associatif alors que ce qu’il aime c’est le patient travail artisanal ? Cette « idée absolument géniale » dixit Thomas est certes follement intelligente comme toutes les autres, mais elle souffre légèrement de naïveté.

Mercredi : Thomas défie le Qatar

Une fatwa contre le Qatar, voilà qui a de l’allure !

Lorsqu’il s’agit d’un sujet grave, Thomas Guénolé change de ton. Le verbe se fait plus haut, la voix plus posée, le débit plus suave. Il sait qu’après avoir résolu les problèmes énergétiques ainsi que le drame du chômage de masse, il joue très gros en milieu de semaine : rien de tel qu’un sujet international pour prendre de la hauteur. Et c’est en commençant par un soutien inattendu à Florian Philippot, visé par une plainte du Qatar, qu’il débute son oracle en associant l’émirat au terrorisme et à la corruption de nos élites françaises. Il aurait certes pu trouvé la lune, ce jour, ou bien nous annoncer que l’eau bout à 100 degrés : mais non. Guénolé, c’est du concret mais aussi beaucoup de perspicacité. Il nous ouvre les yeux sur les drames du monde et nous apporte ses solutions miraculeuses. Esclave et justice moyenâgeuse : « Trop c’est trop sermonne-t-il, mettons l’argent du Qatar dehors ». Une fatwa contre le Qatar, voilà qui a de l’allure ! Mais sans verser dans le soutien inconditionnel au Qatar, nous pouvons toutefois nous demander si sans les milliards investis en France, le programme économique de Saint Thomas serait réalisable ? Parce que la maison garantie pour tous, ensuite l’emploi ont un coût et pas des moindres. Après BHL contre Kadhafi, Guénolé contre le Qatar. Comme quoi, en France, si nous ne savons pas exporter nos biens, nous savons mettre en lumière nos génies.

Jeudi : Thomas nous fait la vidange

« Cela ne concerne pas les ours polaires, enchaîne-t-il, l’homme lui-même est en danger et l’écosystème fera un reboot« .

« Sortir du pétrole, c’est possible », assène-t-il en guise d’introduction. L’auditeur assidu aura deviné, en filigranes, la vitupération d’hier contre le Qatar. C’est ça, Guénolé. Du concret mais du concret qui met longtemps à se dessiner : cette chronique est comme une métaphore du moteur diesel qui se loge derrière son auguste crâne. « Cela ne concerne pas les ours polaires, enchaîne-t-il, l’homme lui-même est en danger et l’écosystème fera un reboot« . Il faut rétablir la planification, remplacer les voitures, supprimer le trafic routier pour passer sur du rail, interdire le plastique, si « l’Etat met en place des incitations ». Hélas, l’auditeur se perd. Cet État jacobin qui a subi les foudres guénoléènnes sur la question énergétique car « trop lourd », le voici propulsé à la tête des solutions pour améliorer notre sort. En génial pompiste de notre cervelle, dont il sait extraire l’essence la plus pure, Thomas nous promet une France d’Autolib (ne fallait -il plus produire d’électricité ?) et de pots de yaourt en écorce de chênes. Et avec les millions de travailleurs nationaux qu’il espère, nous aurions des centaines d’associations qui fabriqueraient des pulls en laine et des toits en chanvre pour des maisons gratuites. Ce que Thomas Guénolé envisage, c’est tout bonnement le Paradis et son allure, qui se rapproche de plus en plus de celle de Monsieur Propre, prend alors tout son sens.

Vendredi : Thomas brise l’omerta de la violence

Notre Kojac de la rue Saint-Guillaume est un idéaliste qui n’a pas peur de défier son pays ou un autre État.

Dans le monde enchanté de Thomas Guénolé, entre deux licornes qui mettent les Qataris dehors et des papillons dorés qui se promènent de fleur en fleur des maisons garanties pour tous, il y a des fausses notes et parmi elles : « les violences des fonctionnaires sur les usagers ». Il prend ainsi pour exemple une scène à la sous-préfecture de Nogent-sur-Marne, où une femme a été expulsée en raison d’une pièce manquante à son dossier pour un titre de séjour (on aurait juré le Pierre Bellemare des grandes années nous narrant une histoire extraordinaire). Dans son viseur : les guichetiers qui agressent les gens (mépris, arrogance), « à la limite du sadisme, de la jubilation » et sa solution : le matricule pour chaque fonctionnaire, pour ensuite se plaindre. C’est du concret ! La France de Thomas Guénolé c’est donc celle sinon de la permissivité totale, sinon de la prise en charge du citoyen du fœtus jusqu’à l’extrême-onction, avec des fonctionnaires guillerets qui ont une pancarte avec leur numéro dessus s’ils sont trop méchants, et d’autres fonctionnaires (ou « travailleurs nationaux ») qui viendraient les exfiltrer s’ils sont de mauvaise humeur et les placer dans un fourgon électrique pour les mettre dans une prison en bois avec un demi panneau solaire pour faire fonctionner la TV.

Que les ronchons et les chagrins passent leur chemin. Notre Kojac de la rue Saint-Guillaume est un idéaliste qui n’a pas peur de défier son pays ou un autre état, n’est pas effrayé par la propositions d’idées novatrices pour sauver la faune, la flore, les orphelins, les chômeurs. Et animé par un seul et unique sentiment : l’amour du Concret.

Julien de Rubempré

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Julien Leclercq

Fondateur du Nouveau Cénacle et auteur de "Catholique débutant" paru aux éditions Tallandier.

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