Partagez sur "Les cinq grands classiques à lire sur la plage cet été"
Le soleil ne peut pas être tenu responsable des lectures creuses sur la plage. Ce n’est pas une fatalité.
Voici une sélection des grands classiques de la littérature à lire ou relire sur le sable chaud. Nous recommandons toutefois à notre lectorat d’éviter les livres Pléiade dans la valise : cela risque d’abimer les couvertures et les fines pages de cette collection ne tolèrent que trop peu les tâches de crème solaire.
Gaston Leroux, Le Mystère de la chambre jaune
La fille d’un physicien est retrouvée agonisante dans sa chambre aux volets clos et à la porte fermée … Sans autre personne à l’intérieur. Voilà le point de départ de l’intrigue la plus rondement menée de la littérature policière et, peut-être, la mieux écrite. Le style de Gaston Leroux, qui navigue entre dépouillement et description minutieuse, confère à son œuvre une atmosphère très « casquette à carreaux, machine à écrire et cigarette brune ». Grâce à l’intelligence du fameux Rouletabille, le puzzle se reconstitue peu à peu et le lecteur, à la toute fin, découvre enfin l’évidence qui était sous ses yeux depuis la première page. C’est aussi et surtout un roman sur les pouvoirs de l’esprit et la magie de la raison, un livre qui appelle à dépassionner une enquête comme une relation, pour parvenir à la vérité. Enfin, pour celles et ceux qui veulent poursuivre l’aventure avec Gaston Leroux, n’hésitez pas à vous jeter ensuite sur le Fauteuil hanté et ses académiciens qui tombent les uns après les autres.
Truman Capote, De Sang-froid
1959, Kansas : deux bandits massacrent une famille de fermiers sans aucune raison valable. Le narrateur du roman s’empare dès lors de cette affaire et nous emmène sur les lieux du crime, avant d’interroger tous les témoins potentiels. Plus qu’une enquête sur un fait divers, De Sang-froid est une recherche sur les tréfonds de l’Humanité, c’est un roman sur le Mal. Grâce à un ton journalistique, Truman Capote nous faire un récit littéraire de ce qui aurait pu être un excellent numéro de Faites entrer l’accusé, avec son talent littéraire, son détachement et son sens du tragique. Nul mieux que lui n’a sûrement mieux mis en valeur des démons qui rongent des cerveaux fragiles et les poussent à commettre l’irréparable.
Marcel Proust, La Recherche du temps perdu – Tome 1
Le Nouveau Cénacle a beaucoup écrit sur Marcel Proust (Proust, vie et mort d’un écrivain ; Proust et Cocteau ; Pourquoi lire Proust en 2015 ; Sur une phrase de Marcel Proust) et à raison : son œuvre est fondamentale. Sans toutefois se plonger intégralement dans La Recherche du temps perdu (car au moins six mois sont nécessaires), lire le premier tome est déjà suffisant. Dès les premières pages, le narrateur se décrit, enfant, attendant sa mère car il n’arrive pas à dormir et nous découvrons d’emblée son dédale intérieur, les chemins de sa mémoire, son rapport au temps, au réel, au rêve bref, à ce qu’il nommera plus tard « la généalogie du Moi ». La langue de Proust, unique, colorée, chantante, est une œuvre architecturale à part entière. Non, Proust n’est pas trop compliqué à lire sous le parasol : il apprend l’humilité. Il invite à la perdition jusqu’à comprendre ce qu’il recherche : que le lecteur se lise lui-même.
William Styron, Le Choix de Sophie
Stingo est un jeune écrivain qui choisit de s’isoler pour écrire son premier roman, puis se lie d’amitié avec Nathan et Sophie, ses voisins du dessus et apprend que Sophie est rescapée des camps des camps de la mort. Elle lui explique la vie dans les camps, les hommes et les femmes croisés durant l’enfer concentrationnaire, les humiliations vécues. Dans l’intimité du couple, Sophie devient la victime des problèmes mentaux de son mari et elle s’enfuit avec Nathan à Washington. Instable, elle finira tout de même par lui révéler le secret qui donne son titre au roman. Entre examens de conscience et prises de recul, ce livre est une plongée dans l’antisémitisme, l’esclavage, la violence et la paranoïa au cours duquel se révèlent les âmes profondes des différents protagonistes. Même s’il faut parfois s’accrocher (entre les changements de narration, les descriptions effroyables), on ne saurait que trop conseiller ce roman qui révèle la tragédie de l’histoire de chaque être.
Les poésies de Paul Valéry
Finissons avec une note poétique, car si la lecture de roman est essentielle, celle de la poésie est vitale. Parce qu’elle réenchante la vie de même qu’elle sublime le paysage, la poésie est un mystère qui se renouvelle sans cesse et Baudelaire, comme Rimbaud, Hugo et Mallarmé en sont les preuves littéraires vivantes. Pour apprécier la mer, sentir ses embruns et déguster une à une chaque minute passée à regarder les vagues mourir sur ses orteils, rien ne vaut l’œuvre du sétois Paul Valéry. La Jeune Parque, Le Cimetière marin, Charmes … Ce n’est certes pas la littérature la plus accessible, mais c’est ce qui en fait tout le sel. Paul Valéry est un bijoutier qui taille un dictionnaire avec ses ciseaux et ses lames pour en créer le plus beau des diamants. Chaque vers de Paul Valéry éloigne de Guillaume Musso, tant il sait jouer avec la musique de notre esprit. A lire seul sur un rocher.
A relire :
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