La chronique hebdomadaire de Christophe Bérurier, professeur de français en ZEP.
Lundi
Lendemain du deuxième tour des élections municipales. Personne n’en parle.
Une réunion s’improvise sur l’heure du déjeuner pour préparer les devoirs communs de quatrième. La même réunion pour les brevets blancs de troisième aura lieu ce jeudi. Les sujets que j’ai proposés il y a une semaine sont ignorés. Pas un mot.
Aujourd’hui c’est le début de la semaine de stage pour ma seconde classe de troisième. Pendant un mois, chaque classe de troisième a le droit à une semaine de stage pour les volontaires. Les classes se retrouvent à effectif réduit. Cette semaine il y aura quatre élèves dans cette troisième.
Dernier conseil de classe du deuxième trimestre. Je suis l’un des deux professeurs principaux.
Ce conseil ayant lieu un lundi, nous ne sommes que trois professeurs présents. La principale adjointe qui préside le conseil nous demande de trouver d’autres professeurs en raison du trop faible nombre de présents..
Pendant le tour de table, la déléguée des parents d’élèves explique que tout va bien :
« Normalement je reçois le retour des feuilles distribuées aux parents par courrier ou par mail. Mais vu que je n’ai aucunes réponses depuis deux ans que je représente les parents, je pense que tout va bien… »
Le conseil de classe a eu lieu grâce à l’annulation d’une réunion et d’un cours d’anglais.
Mardi
Une élève de troisième vient me voir en souriant pour m’informer, suite à ma demande ; elle a reçu une réponse positive : l’année prochaine elle réalise son rêve et entre dans une grande école de pâtisserie. Elle avait redoublé sa troisième pour avoir l’âge minimum demandé pour travailler en alternance. C’est un redoublement utile et réussi. Sa joie fait plaisir à voir.
Jeudi
Matinée très calme. Une heure de vie de classe avec la classe dont je suis professeur principal. Nous parlons de la nécessité de travailler tous les jours pour réussir les contrôles. Une jeune élève prend la parole et explique que les jours où elle se décide à faire ses devoirs dès son arrivée à la maison, elle allume la télévision et là, il n’est plus possible de s’en décoller.
Ma classe ne me croit pas quand je leur dis que je n’ai pas de télévision chez moi.
Après-midi banalisé pour une réunion parents-professeurs. Cinq heures sont prévues mais en travail réel cumulé cela représente environ deux heures de rencontre.
Certains parents ne viendront pas. Certains parents ont besoin de leur enfant pour traduire. Certains parents n’ont pas confiance en l’école et viennent pour nous le dire. Certains parents viennent pour aider leurs enfants à progresser.
Je reçois mon élève de troisième future étudiante en pâtisserie, accompagnée de sa maman. Cette dernière m’explique que sa fille lui a fait acheter plusieurs textes de Molière ainsi que le Journal d’Anne Franck. Je la félicite.
Vendredi
Je croise la future élève pâtissière.
« Alors qu’est-ce que c’est que cette passion soudaine pour Molière ? Pourquoi t’es-tu mise à lire ça ?
– Eh bien, d’abord j’aime beaucoup lire le théâtre, c’est plus simple et puis j’ai lu des résumés, ça avait l’air intéressant.
– Très bien, je réponds, lis-les et dis-moi ce que tu en as pensé, je t’en conseillerai d’autres. N’oublie pas une chose toute simple ; une pâtissière a le droit d’être une intellectuelle. Si tu aimes lire, essaye de ne pas perdre cette passion, ton goût pour le sucré ne fera qu’enrichir ton goût pour la lecture… et inversement. »
Cours avec une classe de troisième. Il y a cinq élèves présents. Certains sont en stage, d’autres sont en visite des lycées de la région. Encore une fois, nous n’avons pas été informés de l’absence des élèves.
En discutant avec les présents de ce qu’ils pensent du nouveau chef d’établissement par rapport à l’ancien, ils m’expliquent pourquoi ils ne l’apprécient guère :
« Lui il veut faire sa loi, ça va pas ça. Alors que M.**** lui, il rigolait avec nous ».