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En septembre 1976, le virus Ebola est identifié par un médecin belge au nord du Congo touchant 318 personnes dont 280 décédés, soit plus de 90% des personnes infectées, un taux extrêmement élevé pour une épidémie. Le réservoir naturel aurait été localisé au sein d’une famille de chauve-souris frugivores. Le virus est réapparu depuis en 1994 au Gabon, en 2000 en Ouganda, en 2007 de nouveau au Congo. Puis plus grand chose jusqu’en 2014.

Guinée forestière. Un singe marche dans la forêt, ramasse une chauve-souris morte et s’en fait un bon petit déjeuner. Quelques jours plus tard, un chasseur qui passait par là trouve un singe mort et s’en fait un bon déjeuner. Quelques jours plus tard, le chasseur meurt d’une maladie foudroyante. Avant de le mettre en terre, on l’habille avec le respect, on lui tient la main, on lui fait un dernier au revoir… Vrai ou faux, Ebola est transmis et se transmet très rapidement… Jusqu’à la Sierra Léone et le Liberia. Non pas que l’Africain ne soit pas hygiénique, au contraire, mais qu’il est sans moyen de l’être dans cette région du monde. L’ONG Action contre la Faim se désole de la difficulté d’y trouver un désinfectant aussi basique que de l’eau de javel. Et comme le virus se transmet par un simple contact de fluides corporels (salive, sang, sperme, larme ou sueur), cela peut aller très vite. La période d’incubation (pendant laquelle le corps n’est pas contagieux) est comprise entre 2 et 15, voire 21 jours (selon les uns et les autres) et les premiers symptômes peuvent être confondus avec des maladies plus habituelles comme la grippe ou le paludisme. C’est à partir de ces symptômes que le corps devient contagieux jusqu’à atteindre son pic de contagion au moment du décès et des heures qui en suivent.

Sylvain Blaize, un responsable à l’institut Pasteur, indique que le virus a peu de chances de gagner les occidentaux car il « tue ses victimes de façon si foudroyante qu’il ne laisse guère de temps aux personnes contaminées pour le propager ». Malheureusement les chiffres ne lui donnent pas raison : le 19 avril, l’OMS dénombre 111 victimes ; au 11 août 2014, 932 morts ; au 07 octobre, la barre des 4 000 cas mortels est franchie (4032 pour être précis).

Des précautions dérisoires face au Léviathan bactériologique

La tragédie est telle que les premiers exposés ne sont rien d’autres que le personnel de santé sous-équipé, débordé, formé à la hâte. En première ligne, telle des fantassins, les infirmiers et infirmières s’arment de courage pour tenir les dispensaires. Au Liberia, un hôpital a été braqué par des malfrats qui ont relâché l’ensemble des patients atteints d’Ebola au motif que cette maladie était imaginaire. Les autorités ont mis plus d’une semaine à retrouver l’ensemble des malades. Dans ce même pays, un agent de santé vient tout juste de mourir après avoir été mordu par un malade d’Ebola qui tentait de violer une autre patiente. Un autre a été contaminé en changeant les draps d’un patient. De nombreux centres de santé ont fermé leurs portes… faute de praticiens, décédés. En Sierra Léone, le gouvernement a décidé d’une mise en quarantaine de trois jours. En Guinée, les bureaux ont été fermés pendant deux jours, le temps de décontaminer l’ensemble des équipements par des spécialistes.

De multiples recommandations sont ainsi émises dans la sous-région : ne pas toucher ou manipuler des animaux morts ou des cadavres, se laver régulièrement les mains à l’eau et au savon, ne pas se serrer la main et éviter les accolades. Avant de partir en vacances en France, le président de la République ivoirienne, Alassane Ouattara, a salué ses ministres de la main, instaurant ainsi la distancia, la nouvelle manière de se saluer. En Côte d’Ivoire, on trouve désormais devant les établissements privés ou publics des fontaines d’eau et du savon. Avant de rentrer à la banque, l’agent de sécurité met du gel antibactérien sur les mains. Les autorités religieuses suivent scrupuleusement les directives du ministère de la santé et demandent à leurs fidèles de ne plus se saluer par la main, voire même de respecter avec son conjoint le jeûne d’Ebola. La viande de brousse est désormais interdite de toute consommation : finis les agoutis ou les hérissons braisés, au risque de se retrouver aux arrêts si les chasseurs se font surprendre en train de vendre leur marchandise. Les gels antibactériens se vendent comme des petits pains, de la main à la main dans les rues des capitales. Désormais la moindre fièvre est suspicieuse et certains cas provoquent la pagaille et la panique.

De la prudence à psychose mondiale : vers un vaccin providentiel ?

Dans les pays touchés, la peur des autorités face à l’épidémie va même jusqu’à interdire la presse d’accéder à certaines zones et donc à certaines informations. Le personnel médical se voit interdit de communiquer avec les journalistes. Mais la mauvaise information peut aussi entraîner de fâcheuses conséquences. Au Sénégal, un patron de presse a été condamné à un an de prison avec sursis et 1600 € d’amende pour avoir indiqué une fausse information sur des cas d’Ebola survenu dans le pays. Au Nigeria, des médias ont indiqué qu’on pouvait échapper à Ebola en buvant de l’eau salée. Devant une telle ignorance, certains gouvernements se hâtent de former les journalistes sur le sujet.

Côté économie, le virus Ebola pourrait coûter jusqu’à 26 milliards d’euros d’ici la fin 2015, selon la banque mondiale, si le virus venait à sortir de la zone actuellement endémique. Le facteur « peur » provoque des liaisons interrompues avec les pays touchés, laissant ainsi des milliers de personnes dans l’incapacité de rentrer chez eux. 38 000 Ivoiriens seraient bloqués au Libéria par exemple dont des milliers de commerçants. Idem en Guinée ou en Sierra Léone. « Monsieur Ebola, vous êtes une star, mais je ne vous salue pas » a déclaré le plus célèbre Gondwanais de la planète, Mamane, sur les ondes de RFI. Oui Monsieur Ebola est devenu la star des médias, celui qui reporte à plus tard, celui qui annule les manifestations (séminaires internationaux, Tour du Faso, CAN 2015 ?), celui qui arrive à franchir les continents sans passeport ni visa, celui qui fait tout simplement peur.

Lorsque le virus atteint les États-Unis, l’Espagne, l’Allemagne et maintenant la France – un cas suspect vient d’être envoyé ce jeudi 16 octobre 2014 à l’hôpital Bégin de Saint-Mandé – l’une des douze structures équipées en France pour traiter ce genre de cas – sous un scaphandre et sous haute escorte -, tout le monde se met en quête d’un vaccin. A ce petit jeu, les Russes semblent avoir une longueur d’avance. Très présents en Guinée, les russes connaissent bien le terrain où le virus y sévirait depuis 1982 sans être étranger des autorités locales ; ce qui amène certains à dire que si la viande de brousse était contaminée, il n’y aurait plus de chasseurs en Guinée. On peut désormais se poser la question de l’homologation, du coût, de la distribution dans une zone qui n’a pas les moyens de se le payer.

Il paraît en tout cas que Roselyne Bachelot est prête à tester la version beta tout en se portant acquéreur d’un lot de 7 milliards de vaccins.

 

Fabrice Piofret

 

Fabrice Piofret

Fabrice Piofret

Il paraît que ma photo traîne dans la chambre de Julien de Rubempré... 34 ans.

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