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Richard TRIAN, ce jeune quadragénaire qui vit à proximité de Cognac, dans les Charentes Maritimes, est venu tardivement à la peinture. Lui qu’on voyait habituellement avec sa guitare ou son appareil photo, le voilà qu’il se découvre dans les années 90 une nouvelle passion pour les arts plastiques au contact de l’œuvre de Pierre Soulages. En fait il lui faudra attendre encore une dizaine d’années pour que sa palette devienne plus mature grâce à des constructions plus élaborées et plus sereines selon ses propres mots.

Il va intituler son parcours actuel d’ « itinéraire d’un cosmopolite » parce qu’il revendique l’utilisation de différentes techniques et l’apport de courants picturaux variés dans sa peinture. Ainsi  sans être un artiste du Street Art, il se sent proche de ce mouvement puisque certaines de ses dernières toiles sont regroupées dans une série intitulée « Urban Tattoo ». De tout cela il en découle un style puissant d’une grande intériorité.

Approcher les œuvres récentes de cet artiste c’est d’abord éprouver une émotion intense voire violente car tout conduit à être subjugué par leur force picturale.

Richard Trian 1

« Sans titre », 81 x 100 cm, 2012.

A l’évidence on retrouve l’influence de l’Action Painting passionnée de Pollock mais avec en plus les paisibles méditations de Rothko ainsi que le lyrisme puissant d’un De Kooning.

Puissance et richesse sont les mots  les plus appropriés pour qualifier le travail actuel de ce peintre. L‘artiste ne lésine pas sur les moyens utilisant indifféremment l’acrylique, le posca et l’encre. Le résultat est alors fulgurant : Richard Trian crée un monde lumineux, éblouissant et envoûtant. L’expression abstraite est d’une ampleur sans égale comme un cri coagulé qui ne s’arrêterait jamais.

On peut affirmer également, sans prétention aucune, que chaque toile de cet artiste se présente comme un bloc de sensations comparable à « un composé de percepts et d’affects » selon l’expression commune de Gilles Deleuze et de Félix Guattari.

Richard Trian 2

« Sans titre » 130 x 162 cm 2013

Indéniablement l’élément musical et la danse  y jouent un rôle prépondérant.

Les compositions sont toutes savamment agencées et orchestrées grâce à de subtils entrelacs. Les couleurs et les rythmes des toiles entretiennent un mouvement continu dans leurs riches nuances chromatiques. A cela s’ajoutent des accords chauds et froids qui alternent avec des configurations légères et lourdes et composent des contrepoints d’un grand raffinement.

Citant Michel Serres, on perçoit nettement une vibration musicale qui viendrait sourdre la matière pâteuse :

« L’œuvre est faite de formes, le chef-d’œuvre est fontaine informe de formes, l’œuvre se fait de temps, le chef-d’œuvre est source des temps, l’œuvre est un accord sûr, le chef-d’œuvre tremble de bruits. Qui n’entend pas ce bruit n’a jamais composé de sonates. »

Richard Trian 4

Mais au-delà de la vibration musicale, l’« expressionnisme-abstrait » reste le trait dominant de cette peinture qui permet avant tout d’exprimer la propre personnalité de l’artiste. Au demeurant si cette peinture n’illustre rien, elle exprime au contraire des sentiments – ceux du peintre- mais toujours selon une technique séduisante qui ne saurait cacher l’essentiel.

Chaque centimètre carré de toile peinte dans une facture très fortement pigmentée, fait percevoir l’effort passionné de cet artiste. Il s’exprime, par des signes picturaux complexes et magiques pour dire son propre sentiment de vie entre exaltation et angoisse.

Christian Schmitt

www.espacetrevisse.com

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Christian Schmitt

Critique d'art. Auteur de "l'univers de J.L. Trévisse, artiste peintre" (ed. Lelivredart 2008) et de trois autres ouvrages sur les vitraux réalisés par des artistes contemporains aux ed. des Paraiges: Jean Cocteau (2012), Jacques Villon (2014) et Roger Bissière (2016). A retrouver sur : http://www.espacetrevisse.com

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