Ibrahimovic a longtemps divisé l’Europe avant de mettre d’accord la France entière. Son jeu, ses statistiques, son caractère semblent faire l’unanimité parmi les journalistes, les supporters et les passionnés de ballon rond. Mais Zlatan a changé. Julien de Rubempré nous explique pourquoi.
Contre l’ASM dimanche soir, il était encore champion de l’applaudimètre au Parc. Lorsque le speaker crie son nom, tout le stade se lève et hurle le patronyme du suédois. Avant le coup d’envoi, son nom est scandé. Comme lorsqu’il s’apprête à tirer un coup-franc ou un penalty. Du jamais-vu depuis que Pauleta a raccroché les crampons. Avec plus de trente buts la saison dernière, une dizaine de passes décisives et plusieurs gestes de génie, Zlatan a porté le PSG jusqu’au titre de champion de France et a d’ores et déjà marqué l’histoire du club. Parce qu’Ibra est une star en plus d’être le meilleur. Il est une icône, un symbole, un héros parfois touché par la grâce qui a le don de pouvoir faire basculer n’importe quel match.
Zlatan ou l’art de la domination mentale
Dès son premier match contre Lorient en 2012, au-delà de ses deux buts qui amenèrent l’égalisation parisienne, c’est par son aura que Zlatan stupéfia tout un public. Ibra râle, crie, éructe, jure, insulte, traite. Se marre. Souffle. Gueule. Fronce les sourcils, chambre, regarde de haut, hurle sur ses coéquipiers. Et plante un doublé. Tout Ibrahimovic est résumé dans son premier match : du talent, de la puissance, de la démesure et un art de la domination mentale tant sur ses adversaires que sur ses coéquipiers.
Si Zlatan ressent une douleur, les deux équipes s’arrêtent de jouer ; lorsqu’un coéquipier rate une passe, il se retourne vers Ibra pour s’excuser aussitôt ; lorsqu’un défenseur veut mettre la tête, lui contrôle de la poitrine ou lève la jambe à deux mètres de haut. Il fascine par la violence qu’il dégage. C’est un géant populaire tout droit sorti d’un roman de Victor Hugo, allégorie virile d’une profonde révolte intérieure. C’est un demi-dieu homérique descendu de l’Olympe pour briller sur un stade. C’est un loubard de série B respecté par tout un quartier qui fait silence dans un bar crasseux lorsqu’il débarque.
La métamorphose de Zlatan
Dans son jeu d’abord. Certes, surtout en équipe nationale où il joue 10 depuis longtemps, il était déjà capable d’effectuer la passe décisive lumineuse ou le centre qui fait but. Mais cette année, il semble avoir compris qu’un joueur majeur ne fait pas qu’empiler les pions : il est celui sur lequel le jeu repose. Il en est le centre de gravité, celui par qui le cuir doit transiter. C’est pour cela que Cavani sera in fine le grand gagnant de la révolution mentale du bad boy de Malmöw : une fois qu’El Matador aura retrouvé son poste d’avant-centre, il sera à la conclusion des caramels de Zlatan.
Et puis son attitude. Il ne semble plus mépriser la ligue 1 ni ses propres coéquipiers (En même temps, Hoarau est parti en Chine et Jallet a pris son abonnement en tribunes). Il apparaît plus décontracté, voire heureux de fouler la pelouse du Parc. Ses liens avec Nasser paraissent véritables et sa complicité avec Thiago Silva, Maxwell ou Matuidi créent certainement un environnement favorable pour lui.
Seul doute le concernant : les matchs de Ligue des Champions. Le seul titre qu’il manque à son palmarès. Et si c’était pour faire durer le plaisir car lui seul aurait décidé de l’année du sacre ultime pour rejoindre l’Olympe ?
Julien de Rubempré