Il faut se souvenir d’où il vient. Avoir conscience de l’énormité de sa performance, dans un stade où le Milan AC, dont il a recruté les deux meilleurs éléments durant le mercato estival, avait pris une gifle au tour précédent. Se rappeler qu’il n’y a pas si longtemps, il quittait l’Europa League tête basse, de sérieux regrets après une prestation presque indigente contre le Red Bull Salzbourg.
La Ligue des Champions lui a donné des ailes. Considérablement renforcé, à grands coups de pétrodollars, par les arrivées de Zlatan Ibrahimovic, Thiago Silva ou encore, il y a quelques semaines, David Beckham, lequel n’a certes plus ses jambes de vingt ans, mais conserve une belle vista, le PSG a rempli le contrat avec la manière. Les recrues ont tenu leur rang. Au but, Salvatore Sirigu a été égal à lui-même : sûr et les mains fermes. Dans l’entrejeu, Blaise Matuidi, malheureusement suspendu au Camp Nou, réalise une saison six étoiles, tandis que le jeune prodige italien Marco Verrati répond aux fortes attentes. En attaque, Ezequiel Lavezzi aura éclaboussé la compétition de toute sa classe, quand bien même il n’a pu trouver le chemin des filets face au grand Barça.
Un Barça qui n’a finalement pas été l’ogre annoncé. Passés par un trou de souris, les Catalans n’auront pas réussi à battre le club de la capitale en deux matchs, étant même virtuellement éliminés pendant vingt minutes. Jusqu’à cette soixante-dixième minute où Leo Messi, diminué par une lésion à la cuisse, mais entré en jeu quelques minutes plus tôt, a délivré un bijou de passe à Pedro dans la surface de réparation. Décidément martyr des Français – c’est lui qui a marqué le but de la victoire espagnole au Stade de France en éliminatoires de la Coupe du Monde 2016 -, l’international espagnol ne s’est pas posé de questions. Sèche comme un coup de trique, sa frappe instantanée du gauche était imparable. Le PSG, après avoir ouvert le score grâce à un Javier Pastore retrouvé au meilleur moment, ne s’en est pas relevé. En première mi-temps, il avait été conquérant. Impeccable en défense. Toujours menaçant à l’assaut du but adverse. Il s’en est fallu de peu pour qu’il n’ouvre le compteur avant la pause, Lavezzi manquant notamment un face-à-face avec Victor Valdes avant une course mal négociée alors qu’il pouvait de nouveau se présenter face au portier blaugrana. Après l’égalisation des Barcelonais, qui vont devoir hausser leur niveau de jeu au prochain tour, ce quel que sera leur adversaire, le score n’a plus évolué. 1-1, après le superbe 2-2 du match aller au Parc des Princes.
Ainsi Paris la néo-qatarie, Paris la libérée après tant d’années de contre-performances, à tout le moins en championnat, n’a-t-elle pas perdu contre Xavi et consorts. De quoi, malgré tout, se réjouir, si tant est que la règle du fair-play financier ne fasse pas de ce réel exploit une embellie passagère. On prédisait enfer et damnations au PSG. Il a joué avec toutes ses forces, son coeur, ses tripes. En exploitant au maximum son potentiel technique grandissant. En obligeant le champion d’Europe 2009 et 2011 à jouer à fond.
En cette soirée du 10 avril 2013, on peut bien sûr être déçu. On peut aussi voir les choses d’une autre manière. Se dire que le football français, qui a si souvent tendu les deux joues, en bonne partie par manque d’ambition, a peut-être mangé son pain noir grâce à cette équipe de très haute volée. Croire en des lendemains qui chantent, ne serait-ce que parce que le règne du Barça, déjà menacé sur le papier par un Bayern Munich à la mécanique redoutablement bien huilée, finira bien par s’arrêter.
Les voilà, les successeurs tant attendus des Raï, George Weah et autres Ginola. Le PSG de Nasser Al-Khelaïfi, Leonardo et Carlo Ancelotti a du coffre. Le soprano de Colony Capital est devenu stantor. On ne peut plus le prendre de haut désormais. Il faut l’écouter et il faudra compter avec lui. Dans l’élimination, il peut aussi exister de belles formes de victoire.
Guillaume DUHAMEL