Partagez sur "Football – PSG – Blaise Matuidi, ou la stratégie de l’échec permanente"
Arrivé en 2011 au Paris Saint-Germain, Matuidi a été tenté de quitter le club durant le dernier mercato estival. Heureusement pour certains, malheureusement pour d’autres, il est toujours au PSG et son trio avec Verratti et Thiago Motta semble obtenir les faveurs d’Emery pour cette saison encore.
Il court. Beaucoup. Il embrasse la maillot. Il récupère des ballons. Il finit ses matchs sur les rotules. Il est devant, derrière. A l’entraînement, on devine qu’il écœure tout le monde, à commencer peut-être par Ben Arfa, par sa capacité à répéter les efforts. Chez les Bleus, Matuidi est aussi incontournable aux yeux de Deschamps et toujours pour les mêmes raisons : il gambade. Il sue. Il va aux charbons. Même Daniel Riolo, pourtant avare en compliments, a récemment déclaré sa flamme pour Blaise.
« Il faut l’encenser, quitte à gonfler ses notes le lendemain. Un grand quotidien a même osé la comparaison avec Modric cet été. Et tout le monde est ravi ».
Son bagage technique fait pourtant sourire. Au sein de ce concert de louanges permanent, Matuidi a tout de même des détracteurs. Qui osent le critiquer comme après son match catastrophique face à City l’an dernier (il n’était pas le seul). Comme après ses matchs ratés durant l’Euro. Lui que l’on voyait rejoindre le banc pour laisser la place de milieu côté gauche à Pogba en sélection, lui que l’on voyait cirer le banc du PSG en vue d’un changement de système, est toujours là. Mystère.
Matuidi ou la peur du changement. La crainte du doute. Il est évident qu’un joueur avec ce profil peut parfois être précieux dans l’entre-jeu, mais bâtir un jeu de possession avec un joueur aussi maladroit ou un système de transmission rapide avec un milieu qui ne sait pas faire une transversale est tout de même problématique. L’autre ritournelle est aussi connue : le PSG, détenu par le Qatar et ses vilains pétrodollars, aligne un joueur français. Alors il faut l’encenser, quitte à gonfler ses notes le lendemain. Un grand quotidien a même osé la comparaison avec Modric cet été. Et tout le monde est ravi.
Matuidi ou l’énigme de la certitude
C’est un joueur d’entraînement. Un de ceux que les coachs adorent, que le public aime parce qu’il se donne sans compter, que ses coéquipiers apprécient parce qu’il fait des courses à leur place. Il fait aussi penser à ce joueur ni bon ni mauvais qui venait toujours le mercredi après-midi et qui se dévouait pour aller aux cages ou jouer en défense. Au final, il était devenu indispensable. Seulement voilà : Matuidi est le symbole d’une équipe qui ne progresse pas. Emery a signé avec une besace pleine de promesses : un jeu rapide vers l’avant, une équipe en 4/2/1/3 avec en fin les clefs du jeu pour Pastore, et un milieu Krychowiack / Verratti. L’impact physique pour l’un, la finesse pour l’autre.
Mais après quelques piètres résultats, Emery est tombé dans les mêmes ornières que Blanc et Deschamps (on ne peut ici accuser Ancelotti qui n’avait pas les mêmes joueurs à disposition). A la moindre prise de risque qui ne donne pas satisfaction, on revient à Matuidi. A ses contrôles manqués, ses centres directement en six mètres, ses passes à deux mètres. Matuidi est un bon sportif, qui fait illusion en Ligue 1 face à la médiocrité des autres, mais, hélas le PSG comme les Bleus ont besoin d’un grand footballeur au milieu de terrain.
« Paris ne progresse pas et ne progressera pas tant que ce joueur sera dans ce milieu ».
C’est l’incarnation d’une certaine frilosité tactique. Aligner Matuidi, c’est se reposer sur une certitude, souvent trompeuse du reste. Paris ne progresse pas et ne progressera pas tant que ce joueur sera dans ce milieu, c’est un fait incontestable. En équipe de France, la situation est comparable. Kanté et Pogba doivent prendre le pouvoir, tout comme l’inégalable Pastore en club. Même di Maria en 10 serait une innovation tactique intéressante (sans compter que l’inclure dans ce milieu à trois, là où il a effectué la meilleure saison de sa carrière au Real, n’aurait rien d’abracadabrantesque).
Gageons qu’Emery sera celui qui va mettre un terme à ce mythe du bon-soldat-toujours-nécessaire-dans-une-équipe. Un milieu récupérateur peut savoir jouer jouer au foot, cela n’a rien de paradoxal. Il est vrai qu’un supporter parisien est toujours un romantique dans l’âme, qui songe avec nostalgie à Jay-Jay Okocha et Valdo. C’est dans l’ADN du club. Mais ce dernier ne pourra pas tutoyer les sommets européens en retombant année après année dans les mêmes travers.