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Les éditions Perrin publient La Saga des Bonaparte, une fresque remarquable de la famille qui a marqué non seulement le XIXe siècle mais aussi le XXe siècle à travers le règne de son membre le plus éminent : Napoléon. 

En 1844, Balzac confiait : « Quatre hommes auront eu une vie immense : Napoléon, Cuvier, O’Connell, et je veux être le quatrième. Le premier a vécu la vie de l’Europe, il s’est inoculé des armées ! […] moi, j’aurais porté toute une société dans ma tête ». Entre les deux, l’Empereur et l’écrivain, peu de points communs au premier abord mais l’un comme l’autre ont marqué l’époque de leur oeuvre. L’un a voulu – et presque réussi – à conquérir l’Europe tandis que l’autre a souhaité « faire concurrence à l’état civil ». Plus remarquable encore, la famille Bonaparte aurait même pu faire partie de La Comédie humaine tant elle regorge de caractères, d’ambitions et de haines recuites. 

« A l’été 1795 finissant, Napoléon était entièrement libre, sans amour, sans idole ou sans modèle. La Corse avait disparu de ses pensées et sa famille s’était éloignée de lui. Comme dépouillé, il était presque nu quand le destin vint lui sourire ».

La Saga des Bonaparte relatée par Pierre Banda – par ailleurs responsable du patrimoine et des finances à la Fondation Napoléon – confirme cette intuition. Il y a d’abord le père, Charles, « intriguant » corse qui, grâce à son obstination, est parvenu à faire entrer ses fils dans la carrières des armes. Après son décès, ils gravissent les échelons. Pierre Branda écrit : « A l’été 1795 finissant, Napoléon était entièrement libre, sans amour, sans idole ou sans modèle. La Corse avait disparu de ses pensées et sa famille s’était éloignée de lui. Comme dépouillé, il était presque nu quand le destin vint lui sourire ». Devenu général après ses prouesses militaires notamment à Toulon, Napoléon s’envole vers sa destinée tandis que son aîné découvre le difficile apprentissage de subalterne puis de roitelet soumis à l’Empereur. 

La postérité Bonaparte

L’histoire de cette famille est inséparable de celle de l’Europe. Caroline, la plus jeune soeur de Napoléon, devient reine de Naples et grande-duchesse de Toscane et Jérôme – le plus jeune des frères, est sacré roi de Westphalie. « L’Aiglon », fils de Napoléon et de Marie-Louise, était promis à un avenir plus glorieux encore : roi de Rome, il était appelé à succéder à l’Empereur. Ce dernier était même fier de ce fils qui descendait des Habsbourg et des Bourbons. Il incarnait cette légitimé que Napoléon a cherché durant tout son règne. Mais après les revers militaires, l’Aiglon demeura prisonnier à Vienne dans sa « cage dorée ». Sa vie durant, il songera à son père : « S’il ambitionnait bien de lui succéder, il ne voulait pas flétrir par quelque aventure indigne ce nom de Napoléon qu’il chérissait par-dessus tout ». 

« Les fins de règne de Napoléon Ier et de Napoléon III sont étonnamment semblables. A chaque fois, à leur tentative d’instaurer un Empire libéral succéda une cruelle défaite ».

Louis-Napoléon Bonaparte, futur Napoléon III, marque également le XIXe siècle de son empreinte avec son épouse Mathilde (la fille de Jérôme Bonaparte !) et connaît un sort similaire à celui de son illustre aïeul : « Les fins de règne de Napoléon Ier et de Napoléon III sont étonnamment semblables. A chaque fois, à leur tentative d’instaurer un Empire libéral succéda une cruelle défaite ». Après Waterloo, la bataille de Sedan. Son fils « Napoléon IV » maintiendra l’illusion quelques années encore mais la France en avait décidément terminé avec les Bonaparte. 

Les Bonaparte au XXe siècle 

Il n’en demeure pas moins que la famille continua à traverser les siècles. Charles Joseph Bonaparte, petit-neveu de l’Empereur, brillant avocat installé aux Etats-Unis se lie d’amitié avec Theodore Roosevelt, s’oppose et démantèle l’empire Rockefeller, puis crée en 1908 le Bureau of Investigation, soit l’ancêtre du FBI ! Sa lointaine cousine Marie Bonaparte devient, elle, une fidèle amie de Sigmund Freud et participe à l’introduction de la psychanalyse en France.

« Deux géants face à face. Deux noms héroïques enfin réunis. (…) Le jeune résistant était évidemment ému de rencontrer le chef de la France libre ». 

Le portrait le plus touchant de ce livre est sans conteste celui de Louis. Celui que Sacha Guitry nommait « le plus bel homme du monde », s’engagea dans la résistance en 1942. Lui qui dès 1939 s’était engagé contre l’extrémisme, affronte la clandestinité, les arrestations, le « mitard » ainsi que les interrogatoires pour lutter contre l’occupation allemande. Décoré de la croix de guerre en 1946, il rencontre le Général de Gaulle : « Deux géants face à face. Deux noms héroïques enfin réunis. (…) Le jeune résistant était évidemment ému de rencontrer le chef de la France libre ». 

Dans Splendeurs et misères des courtisanes, Balzac écrit : « Le génie en toute chose est une intuition ». Celle de Napoléon aura été de bousculer l’Histoire avant de se heurter à son sens tragique. La Saga des Bonaparte est palpitante car elle nous plonge au coeur de cette dynastie venue d’Ajaccio et qui s’est installée dans les plus grandes cours d’Europe pendant presque cent ans. La saga ne semble jamais connaître de fin. Le livre n’est pas terminé. Le coeur des Bonaparte bat encore. 

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Julien Leclercq

Fondateur du Nouveau Cénacle et auteur de "Catholique débutant" paru aux éditions Tallandier.

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